dimanche 28 juillet 2013

Fascicoliphobie: ce bon vieux fichier qui fait peur à nos Ministres

Le Ministère de la Culture s'est trouvé une nouvelle phobie: le fichier légal revendu d’occasion par un consommateur. Et pour l'occasion GreenSI invente un nouveau mot, la fascicoliphobie - du latin fasciculus (petit paquet, assemblage de même chose, qui représente le fichier).

Dans une note interne, que s'est procurée PC-Inpact, le rapporteur s'interroge sur les risques d'existence d'un marché d'occasion de fichiers d’œuvres culturels numériques achetées... légalement!
Ce marché pourrait réduire la "juste rémunération des créateurs" et le financement de la création. Et pour créer des marchés d'échanges, tout le monde sait que le numérique et l'Internet sont redoutables.

En gros si vous achetez un logiciel, une musique ou un film par téléchargement, vous ne pourriez pas le revendre comme vous le faites avec un support physique. Étrange raisonnement pour ceux qui ont déjà intégré le monde numérique et veulent le construire sur de nouvelles bases. Mais visiblement pas pour ceux qui voient la numérisation comme une menace.
On était si bien sans Internet...

Et donc ce bon vieux fichier, déjà combattu par Hadopi avec force et grandes dépenses, quand il est suspecté d’illégal, se retrouve encore sur la croisée des tirs nourris alors qu'il est légal.
Allez comprendre!

Pendant ce temps une étude montre qu'en Norvège l'offre légale fait fondre le piratage. Alors si l'offre légale se développe, l'économie va être submergée de fichiers légaux... que les gens pourront revendre.

Laissons les sages de la Commission de réflexion créée pour l'occasion réfléchir et abordons le sujet sous l'angle de la transformation d'une économie de biens possédés à des biens utilisés.

La location de voiture est par exemple en totale effervescence avec le développement d'une économie et de communautés de partages. Les consommateurs n'ont plus besoin de posséder les voitures mais peuvent les utiliser quand ils le souhaitent. C'est aussi le modèle des offres légales d'écoute de toutes les musiques que l'on souhaite pour un forfait mensuel. Et ce fut le cas de feu nos vidéos clubs avant le développement de l'Internet et de la VOD.

En fait le physique permet des modèles de partage limités (les loueurs de voitures par exemple) alors que le numérique permet des modèles de partage infinis (avec les possibilités offertes par des modèles d'échanges d'objets et de relations sans cess renouvellés sur Internet).

Pour GreenSI "c'est ça la bonne question" comme dirait le professeur Lanning dans iRobot.

 

Le problème n'est donc pas de savoir si on peut revendre une œuvre numérique mais de savoir comment créer des marchés pour n'utiliser que ce dont on a besoin, et quand on en a besoin. Et ne pas en payer le coût quand on ne l'utilise pas. La revente n'est qu'un moyen pour les consommateurs de créer ces marchés si ils n'ont pas été créés par d'autres.
Et c'est même quelque chose de vertueux globalement. Puisque cela optimise le nombre d'objets physique a fabriquer, et les infrastructures de stockage pour ce qui est numérique.

Si on applique ce raisonnement aux ressources naturelles on retrouve les principes du développement durable et de l'économie de partage qui ne sont pourtant pas combattus. Personne ne défendrait l'idée de ne pas économiser le carburant parce que cela réduirait les taxes qui financent la prospection de pétrole. Si ? ;-) 

Mais en revenant à la culture, ce monde optimisé ferait peur. Pourquoi donc?

Là où la culture tremble, c'est que si on optimise l'utilisation de ces objets, on réduit forcément les revenus de ceux qui touchent un pourcentage fonction du nombre d'objets vendus.

Alors deux solutions s'offrent a notre société:
  • empêcher cette optimisation, et le juridique trouvera sans problème un moyen d'y contribuer, et la résistance s'organisera...
  • ou changer le modèle de rémunération pour passer d'une rémunération au volume vendu a une rémunération à l'usage, voire a la qualité.
Car la triste réalité de notre monde physique payé au volume est que le CD dans le placard sous la poussière, rapporte autant à l'auteur que celui qui tourne en boucle à la maison. Et la note interne du Ministère de la Culture parle de "juste rémunération", et bien ça se discute!

GreenSI espère donc que les sages ne resteront pas sur l'étude des barrières pour contraindre le numérique, mais aborderont bien le changement de règles qui permettra à tous de profiter de ce monde numérique. Un changement vrai pour toutes les industries comme le savent bien les lecteurs de GreenSI.

Après tout, si l'exploration spatiale découvrait une planète viable pour l'homme, et sans pesanteur. Est-ce que nos premiers investissements seraient de fabriquer une usine à gaz pour y recréer de la pesanteur sous prétexte que nos machines terrestres n'y marcheraient pas toutes ?

De quoi méditer cet été sur la plage en regardant les étoiles... et en attendant les résultats de la réflexion des sages.

lundi 15 juillet 2013

One Strategy: une nouvelle organisation chez Microsoft. Pour se poser les bonnes questions?

Cette semaine marquera un jalon dans l'histoire de Microsoft avec l'annonce de sa nouvelle organisation "One Microsoft, one Strategy".

Depuis le départ de Bill Gates (Juin 2007) et l'arrivée de Steve Ballmer, les mauvaises langues diront qu'il ne s'est rien passé chez Microsoft et le cours de Bourse, qui reflète le potentiel d'une valeur, n'a pas bougé (Microsoft à quand le rebond ?) contrairement a ses nouveaux concurrents.



Quand dans le même temps l'environnement de Microsoft et des DSI a lui a été totalement modifié:


  • fin du PC annoncée et le chinois Lenovo n°1 mondial devant HP - tout un symbole,
  • dispersion de Windows entre 5 versions encore utilisées
  • dominance de Chrome et Firefox dans les navigateurs
  • omniprésence des tablettes et des smartphones, avec la domination d'Apple et Samsung
  • Internet mobile dominant et anniversaire des 5 ans de l'Apps Store, et le potentiel d'Android
  • les nouvelles destinations sur Intenet: Facebook, Google et les réseaux sociaux qui se partagent les revenus de la publicité
  • le cloud computing est rentré dans les mœurs comme le SaaS pour la bureautique et les applications, avec la domination d'Amazon et Google
  • le concept même d'Office, ce bundle d'applications intégrées, est dépassé par l'utilisation d'applications plus simples mais centrées sur un seul usage
  • ...
Certes, dans chaque domaine Microsoft a lancé une bataille.
Ce qui faisait dire à GreenSi il a deux mois "Stratégie de Microsoft: toutes voiles dehors" en se demandant si il ne fallait pas faire des choix. Mais de l’aveu même de Bill Gates en Février 2013 le problème c'est que Microsoft n'innove pas assez.

Alors la réponse de Steve Ballmer (par email a ses salariés) et qui pour les analystes s'est faite attendre (opinion du magazine Forbes), c'est de regrouper les différentes divisions indépendantes en "un seul Microsoft" et de lui donner une seule stratégie. Et l'objectif d’innover plus rapidement, avec plus d’efficacité et de potentiel dans un monde qui change vite.

Sceptiques?
Surtout pour ceux qui se souviennent que c'est Steve Ballmer qui a séparé les divisions Serveurs&Tools, Windows et On-line...

Et bien disons que la théorie du management lui donne raison d'explorer cette voie. Une théorie que l'on retrouve dans d'autres industries et d'autres époques. "Together as one" est le nom de programmes internes dans des centaines d'entreprises je pense. Le sempiternel débat entre le conglomérat souvent plus agile et le groupe unifié à priori plus puissant.


Mais ce qui est amusant c'est que "One strategy" est un papier célèbre écrit en 2009 avec des professeurs de la Harvard Business School et un certain Steven Sinofsky... patron exécutif de Microsoft! 

Qui a aussi produit un livre toujours disponible sur Amazon et relativement bien noté 4,5/5 par ses lecteurs. On imagine que Steve Ballmer l'a aussi lu ;-).

La théorie de Steven Sinofsky, qui ne surprendra aucune startup, c'est que si on aligne les capacités, les processus et les comportements de chaque entité de l'entreprise, elle peut stimuler l'innovation en connectant le potentiel des opportunités stratégiques a son exécution opérationnelle

Parce que le problème n'est pas toujours, de ne pas avoir de vision et de ne pas voir les opportunités stratégiques. Microsoft a montré qu'ils en avait une et notamment dans le tactile avec les tables Surface longtemps avant l'iPad.
Mais c'est de faire que l'entreprise, qui avance les deux mains sur le guidon, sache capturer ces opportunités, internes ou externes, les faire siennes et les délivrer. Car souvent elles sont dérangeantes pour l'ordre interne établi et cannibalisent ou remettent en cause des produits existants. Au fait, Steven Sinofsky a quitté Microsoft en novembre dernier après 23 ans de service. Il s'occupe maintenant de startups dans la Silicon Valley et donne des cours à Harvard. 

Le diagnostic de Steve Ballmer est donc certainement le bon. Il est bien accueilli par la Bourse et par les différentes retombées de presse. Certains y voient une copie d'Apple quand un autre Steve avait repris les rennes pour réaligner toutes les énergies et démontrer, contre toutes les idées reçues, que l'industrie des PC, de la musique, des livres et de la téléphonie, pouvaient se prendre en une seule bataille. Si elle était menée par vagues coordonnées (iMac, iPod, iPhone, iPad). Steve Jobs avait confirmé que l'iPad était en projet avant l'iPhone, mais n'a été lancé que plus tard.

Mais pour GreenSI, Microsoft s'est juste trouvé une organisation pour faire le ménage et faire remonter ses questions stratégiques. Qui maintenant peuvent être traitées comme la bataille de "One Microsoft" et pas une bataille entre divisions.

Et ces questions stratégiques tournent autour de la "consumérisation de l'IT".

Car Microsoft principal fournisseur des DSI et des entreprises il y a 5 ans, est aussi entrainé comme ses clients, dans cette bascule de pouvoir et de l'innovation, de l'entreprise vers les consommateurs.

Et à la différence d'un Apple qui compte sur les consommateurs pour faire rentrer ses technologies dans l'entreprise (BYOD), ou d'un Google qui s'appuie sur les équipements des autres (via Android), pour y faire rentrer ses services, Microsoft n'a pas de cheval de Troie pour sa stratégie B2B.

Alors en attendant, Microsoft cherche a renouveler ses contrats sur plusieurs années, avec les DSI déjà clientes. Pour gagner du temps. Et dans le même temps engranger les derniers revenus des licences dans un monde qui bascule dans le SaaS en auditant les licences et les usages de de ses clients. C'est ce que plusieurs DSI m'ont confié récemment. Et ils ne seraient pas les seuls, d'autres éditeurs (bleus et rouges) seraient aussi très actifs dans ce domaine.
Ce qui pourrait d'ailleurs se retourner contre eux et être un accélérateur du divorce avec les DSI. Mais cela n'est peut être pas si grave vu le nombre de futurologues qui disent que la DSI va disparaître. Alors avant de partir messieurs, si vous pouviez signer jusqu'en 2020... ;-)


Pourtant trois pistes au moins existent pour Microsoft pour fédérer une base de consommateurs, suffisamment large (en centaines de millions), et prête à utiliser les produits Microsoft dans l'entreprise. Donc rompre avec une stratégie B2B poussée par des distributeurs ou des commerciaux grands comptes :

  • le Nokia Lumnia (les ventes des autres smartphones sous OS Windows sont marginales),
  • Office largement utilisée dans l'entreprise (mais ne l'est plus nécessairement à la maison),
  • et la Xbox 360 (dont la nouvelle version s’appelle justement la Xbox One).
Mais si Microsoft n'arrive pas a s'ancrer durablement dans le B2C auprès des consommateurs, pour soutenir sa stratégie vers les entreprises, il ne lui restera plus qu'a de se recentrer sur le B2B (serveurs, SGBD, ERP...) ou de se couper en deux: entreprises (B2B) et consommateurs (B2C).

"One Strategy, Two Microsoft" la prochaine étape? Qu'en pensez vous ?

lundi 8 juillet 2013

WiFi gratuit en gare, c'est bon pour le BYOD tout ça!

Vendredi dernier, deux ministres (Innovation & Économie numérique, Transports) ont lancé les services "gares digitales" avec un WiFi gratuit et des services pour faciliter les déplacements des voyageurs.

Cela semble un peu tard pour aider les vacanciers qui se ruent hors de la capitale et partout en France ce week-end, mais c'est pile-poil pour leur prochaine rentrée professionnelle en septembre. 

Car la gare, c'est aussi le principal lieu de transit professionnel pour aller et revenir du bureau, bien avant les vacances.

Le plan prévoit 100 gares d’ici la fin de 2013 (sur 3000 gares en France dont 230 TGV). Fin 2012 la SNCF qui est à la manœuvre, avait d'ailleurs signé un accord avec Gowex, une entreprise leader dans le développement du WiFi dans les villes, pour équiper la Gare de Marseille Saint-Charles. On imagine que les retours ont été positifs ou que le gouvernement a été particulièrement convaincant pour la généralisation. Et les villes numériques ont aussi besoin de ce type d'infrastructures pour connecter leurs citoyens.

Quoi qu'il en soit, ce plan "Gares digitales" permet d'imaginer une plus forte proportion de salariés équipés en WiFi, sans 3G. Une technologie beaucoup plus abordable que la 3G ou la 4G car sans abonnement. Et donc certainement d'augmenter la part de salariés arrivant avec leur propre équipement Wifi dans les entreprises... en descendant du train tout simplement.

La vision de GreenSI c'est que les tablettes 7" vont fleurir dans les gares. Avec certainement beaucoup plus d'Android que d'iOS.
iPadMini, Nexus ou Kindle Fire comme sur la photo, ou l'une des nombreuses tablettes qui sont lancées en 2013. Un format bien adapté à la lecture, une des activités du voyageur qui prend les transports en commun. Mieux que le smartphone en 5" en tout cas. Mais surtout le 7" est un segment du marché des tablettes très concurrentiel où les offres low-cost permettent d'acheter des produits déjà performants entre 130€ et 250€. Au moins deux moins cher qu'un Smartphone dernier cri ou qu'une tablette 10".

Une fois chargé en Wifi, un article ou un livre se lit sans connexion, car ces tablettes stockent entre 16Go et 32Go en standard.

Les études (dont celle d'Adobe 2013) montrent que les usages sur tablettes sont aussi différents de ceux sur mobile. Et que justement les tablettes sont pertinentes pour les médias, mais surtout les voyages et les achats en ligne.

De plus la SNCF a bien perçu la course à l'accès internet pendant le déplacement, dans les avions et bientôt dans les voitures. Une consultation est donc lancée pour la connexion internet dans les TGV.

Les TER et Transilien présentent aussi un potentiel de clients réguliers qui sont peut-être même prêt à payer pour accéder au WiFi pendant leur trajet. Alors à quand l'abonnement Navigo (en Ile-de-France) avec option WiFi en plus?

D'autre part la France a aussi un retard a rattraper pour l'utilisation des livres numériques (0,5%). Un retard qui s'explique plus par un "manque d'enthousiasme" des grands acteurs du secteur, par une offre moins riche et plus chère que dans d'autres pays: 7% en Grande-Bretagne ou 20% aux États-Unis.

Et quand on explique que le Français refuserait de lire en numérique et préfère le papier, GreeSI se demande pourquoi on ne communique par pour lui expliquer les avantages du numérique (moins de papier, d'encre, de diesel pour distribuer....). Après tout on apprend bien aux jeunes à fumer avec du marketing et de la communication.

Ceci pour dire qu'il y a certainement un potentiel de développement de ces liseuses et que les tablettes 7" vont y contribuer et certainement remplacer les premières liseuses. Des alliances sont en train de se former pour résister comme Booken qui vise l'enseigne Relay (avec la fermeture de Virgin)... justement très présente dans les gares.
 
Le développement du Wifi en gare, et demain dans les trains, pourrait donc booster l'équipement des français avec des appareils sans 3G qu'ils pourront aussi utiliser chez eux avec leur Box.
 
La question de GreenSI est :
que va faire le salarié qui arrive dans l'entreprise avec sa tablette WiFi ?


Réponse 1 : la laisser sagement dans son sac pour ne pas décharger la batterie.

Réponse 2 : demander de la raccorder aussi au réseau de l'entreprise.

C'est donc peut-être le moment de reposer sur la table les règles et les possibilités de raccordement WiFi au réseau de l'entreprise. 

Sur le plan technique, mais surtout sur le plan du management, pour définir les usages autorisés ou pas. Mais c'est aussi l'opportunité de développer l'accès à l'intranet ou aux outils de dialogues internes, pour ceux qui n'ont pas de poste de travail fourni par l'entreprise. Préparons-nous à cette arrivée...

lundi 1 juillet 2013

L'arrêt de Google Reader, quel retour d'expérience pour la DSI ?

Le 1er Juillet 2013, Google Reader, la plateforme d’agrégation de contenu et lecteur de flux RSS de Google sera stoppée. Après un peu moins de 8 ans de bons et loyaux services. Sept ou huit ans, c'est la durée moyenne de vie d'une application en entreprise, mais dans le monde de l'internet certains avaient peut être l'illusion que l'immortalité existait. Google, comme toutes les entreprises, doit upgrader régulièrement ses applications et a décidé de stopper ce service.
Pour GreenSI c'est parce que Google croit aux réseaux sociaux et au développement de nouvelles façons d'accéder et de consommer l'information (mais le débat est ouvert - laissez un commentaire si vous avez une autre explication à proposer !)

Google Reader oblige à s'abonner à des sources (flux RSS de sites).
Avec la prolifération de ces dernières, comme les blogs par exemple, il est difficile (et surtout cela prend du temps) de toujours avoir les "bonnes" sources. Alors que des réseaux comme Twitter, permettent très rapidement de "faire remonter" l'information même si elle provient d'une source que l'on ne suit pas, grâce à la magie du "re-tweet".

Et cette fonction marche aussi dans le temps, c'est-à-dire qu'une info toujours pertinente continue de circuler ce qui augmente son exposition et donc la probabilité qu'on la lise. Google Reader peut donc être remplacé par Google+ et le bouton +1 qui est sur tous les sites. Mais cela demande à l'utilisateur de changer ses habitudes... et ça c'est quelque chose que l'on connait dans l'entreprise.

Ce qui a retenu l'attention de GreenSI sur cette actualité, c'est le contraste entre l'approche de Google et ce qui se passerait dans une DSI pour l'arrêt d'un service non critique, mais bien utile a beaucoup d'utilisateurs.

Déjà abordons cet arrêt sous l'angle de la stratégie SI.

L'intégration des services, dans Google+ pour le social, et Chrome pour la mobilité et le multi-écrans, est un fil rouge de l'évolution des produits Google. Ce fut le cas pour Picasa (photos) et d'autres service qui ont rejoint Google+. L'arrêt de Google Reader est une conséquence assumée par Google.
Transposée au SI de l'entreprise, cette stratégie serait de définir un poste de travail pour l'utilisateur, social et mobile, qui lui permette d’accéder a l'ensemble de l'information, de collaborer avec ses réseaux internes et de lancer les outils dont il a besoin. En clair, ne plus raisonner applications séparées qui réinventent leur IHM en fonction de l'humeur du chef de projet, mais uniquement en services qui viennent s'intégrer dans un poste pensé pour l'efficacité de l'utilisateur.

Je pense que la majorité d'entre nous reconnaîtra plus leur SI comme une somme d'applications, rarement pensées pour être intégrées, et le poste de travail comme la conséquence de ces applications exposées aux utilisateurs. L'arrêt d'une application est un évènement rare et le nombre d'applications augmente chaque année. Alors, de là à aller stopper une application encore utilisée, parce qu'elle est un "silo étanche" non aligné avec la stratégie du poste de travail cohérent pour l'utilisateur, vous n'y pensez pas...

En terme de conduite des changements


L'annonce a été faite le 13 mars sur le blog officiel de Google et avec un message pop-up pour les utilisateurs. Peut-être une idée à retenir pour le marketing de la DSI. La tenue d'un blog pour expliquer et annoncer les évolutions du SI, la communication directe avec les utilisateurs, et la capture de leurs remontées.

On peut voir dans l'analyse de la recherche de "google reader" depuis 2005, que cela a provoqué plus qu'un doublement des discussions des internautes et articles sur le sujet lors de l'annonce de l'arrêt. Une pétition a même été immédiatement lancée pour tenter de faire faire marche arrière à Google. En vain.
Les prétendants à la reprise du service comme AOL, Feedly se sont alors mis sur la brèche pour adopter les utilisateurs de Google avant qu'ils ne deviennent orphelins. Ces utilisateurs "irréductibles du RSS" qui ne souhaitent pas encore changer leurs habitudes, car certainement ils adorent trier, classer et avoir l'illusion de rien rater, car ils ont lu tous leurs flux  ;-)

Retour à la  DSI avec l'annonce de la fin d'une application encore utilisée.
Elle provoque généralement l'équivalent d'une pétition. L'insatisfaction de quelques utilisateurs, qui s'ils sont influents, peuvent obtenir le questionnement du DSI par le DG ou un Directeur bien placé. Et là, tous les arguments qui avaient pourtant emporté la décision du représentant des utilisateurs au comité de pilotage, fondent comme neige au soleil... 

L'application gagne d'abord un délai et parfois continue à coexister avec celle qui la remplace de nombreuses années après. L'argument ultime étant qu'on ne sait jamais, si on doit un jour consulter en urgence une de ses infos, il faut bien garder l'environnement complet. Là où la facturation des services SI est individualisée par Directions, on peut faire jouer l'argument du coût supporté par les derniers utilisateurs, avec le risque de repasser par la case pétition et questionnement des coûts de la DSI...

Une fois la phase de résistance passée, on arrive à préparer le démantèlement de l'application. La démarche Google c'est... débrouillez-vous!

Google ouvre ses API a de potentiels repreneurs (Feedly et autres), permet à l'utilisateur de télécharger ses données et le jour dit, coupe le service. Tant pis si l'utilisateur n'était pas prévenu ou s'il n'a rien fait. De toutes les façons il avait accepté (sans les lire) les conditions d'utilisation qui disaient que ce service pouvait être coupé à tout moment.

Dans l'entreprise, avec un étrange flou autour de la question, c'est parfois la DSI qui est considérée comme responsable de l'impact que peut avoir la fin du service. Même quand les utilisateurs, prévenus de longue date, n'ont pas engagé les actions de reprise de données ou de changement de système. Peut être qu'il faudrait faire signer des conditions d'utilisation avant tout lancement d'application ?

Vers une nouvelle agilité à développer pour les utilisateurs


L'arrêt de Google Reader montre bien que la démarche de Google est très différente de la réalité dans l'entreprise.

Pourtant la "consumerisation" du SI est considérée comme une tendance forte. Elle est mise en exergue avec l'arrivée de terminaux amenés par les utilisateurs (BYOD) qui utilisent les services en ligne se développant dans le Cloud public. Ces services pouvant s’arrêter sans prévenir.

On va donc implicitement vers une plus grande responsabilisation des utilisateurs, a laquelle il ne sont pas habitués. Que ce soit sur la prise en main de leur nouveau terminal, sur sa sécurité, la sécurité des données, ou sur l'utilisation des services en lignes.
Cela doit nous faire réfléchir sur les nouveaux besoins d'accompagnement de ces utilisateurs dans un monde où la part de services et équipements venant du monde grand public augmente.

Va t-on vers des cellules de support d'un nouveau genre qui essayent et testent les services en ligne du cloud public sur les différents terminaux, et peuvent aider les utilisateurs à avoir plus d'agilité tout en les conseillant, y compris de façon proactive?


L'humour de ceux qui aiment le numérique