mardi 7 mars 2017

Le "low code" une chance que la DSI pourrait manquer


Il y a un an GreenSI écrivait "L'Empire DSI stoppé dans son expansion" et explorait une idée étrange : n'est-il pas temps de quitter la DSI et de la re-booter ? Sous-entendu quitter la DSI actuelle, cette DSI "Empire" qui s'est étendue avec l'informatisation croissante de toutes les fonctions, afin de créer une nouvelle organisation des SI dans l'entreprise, beaucoup plus adaptée à l'économie numérique et au business.

La publication ce début d'année de plusieurs articles sur la tendance du "low code" (comme Nouvelles menaces sur les prérogatives de la DSI), une approche qui challenge une fois de plus une organisation traditionnelle des systèmes d'information, est l'occasion de remettre le projecteur sur une activité essentielle dans une économie numérique : développer !

Un bon carreleur sait carreler, et bien pour GreenSI une bonne DSI doit savoir coder !

On a peut-être tendance à l'oublier, voire à croire qu'il suffit de le sous-traiter au forfait en Inde, mais le développement et l'architecture sont les activités stratégiques dans une économie numérique, faite de plate-formes, où la différenciation est dans la performance, la mobilité et l'expérience des utilisateurs. 

Ainsi, après avoir eu une l'idée d'une application, passé des mois d'études et de conception, de réunions et de comités de décision, il faut bien un jour passer à l'essentiel: la faire développer, la mettre en production et monitorer l'expérience utilisateur.

Et c'est là que le "low code" amène un nouveau paradigme à la DSI en cherchant à fournir aux métiers le service d'une plate-forme technique unique de développement rapide (et surtout minimaliste) pour intégrer cette chaîne.


Le "low code" est pourtant perçu comme un danger par les DSI se sentant court-circuitées alors que c'est bien sûr une formidable opportunité de transformation et de "re-boot" d'un processus applicatif parfois à bout de souffle.

Ce nouveau paradigme mixe technique ET organisation (processus collaboratif de développement), alors qu'une DSI "traditionnelle" pense souvent uniquement technique. Dans ce type de DSI, après avoir proposé un développement rapide "low code", ne vous étonnez pas d'être invité à une réunion pour savoir quelle est la meilleure solution entre Mendix, Appian ou Outsystems - des plate-formes "low code" - et des environnement de développement plus classiques comme Symfony2 (PHP) ou VisualStudio.
En fait la question n'a pas de sens. On ne parle pas de la même chose. On ne peut comparer des plate-formes de développement permettant de faire du sur-mesure, qui demandent aussi de mettre en place et d'outiller une démarche de développement Agile et Devops, avec des plate-formes de développement rapide "low code" simplifiées intégrant la méthode, dont l'environnement Devops de mise en production et de supervision.
Pour aborder le développement deux approches alternatives s'offrent donc aux DSI:
  • Monter une organisation outillée et une plate-forme à même de développer rapidement les besoins des métiers, quitte a sourcer les développeurs dans des sociétés spécialisées, et donc qui pousse en production rapidement sur une plate-forme Cloud et suit l'expérience utilisateur. C'est ce que les équipes digitales des organisations ont généralement fait ces dernières années pour suivre le rythme de la transformation numérique des métiers.
    C'est l'approche préférée de GreenSI depuis plusieurs années récemment abordée dans le billet "Entreprise du futur: arrêtons de parler de technologies"
  • Adopter une plate-forme "low code" qui offre ce service sous la forme d'une plate-forme, former et animer la communauté des métiers pour l'utiliser et quitter son rôle régalien pour remonter ses manches et passer du côté des "makers". Elle ne permettra pas de traiter tous les développements, mais c'est un moyen d'acquerir un processus collaboratif nouveau, par exemple pour les applications mobiles ou celles avec des transactions simples.
En revanche ce qui est sûr pour GreenSI c'est qu'il n'y a pas d'avenir au mode qui laisserait la technique et la méthode aux choix d'un sous-traitant de la DSI, quand elle même se concentrerait uniquement sur l'achat et le contrôle de la prestation et le "verrouillage" de la plate-forme de production au nom de la sécurité. Cette approche a non seulement aucune chance d'être agile mais n'est pas non plus adapté à la livraison en continu et à l'itération rapide pour adapter rapidement le service.

Le "low code" vient donc réveiller les DSI qui ne sont pas engagées dans la mise en place d'organisations de développements efficaces, qui n'ont pas encore abordé lé DevOps, en offrant leurs services directement aux métiers.
 
Peut-on s'attendre à un sursaut ?

Malheureusement par expérience le premier réflexe d'une DSI devant une nouveauté ou d'un changement de paradigme n'est pas nécessairement l'adoption. Alors ne vous étonnez pas si elle consacre en priorité  100% de son analyse à la comparaison technique des outils et considère la méthode comme un détail de l'implémentation...
Le problème c'est que techniquement il est assez simple de démontrer qu'un environnement de développement sur-mesure est supérieur techniquement au "low code", ce qui peut conforter la DSI dans sa position alors que ce n'est pas la question posée.

La bonne question c'est quel avantage concurrentiel l'entreprise peut-elle acquérir en maitrisant une chaîne de développement rapide et agile ?

Donc sans surprise, d'après l'enquête dirigée par Appian, 73% des DSI pensent que ces plate-formes "low code" sont un risque en terme d'utilisation de mauvaise données et de vulnérabilités, et peu voient les avantages en agilité qu'elles procurent.

Le "low code" pour rebooter la DSI ?

Une DSI "en phase de reboot" devrait au contraire considérer que c'est à elle d'aller chercher et amener les bonnes données à ces plate-formes, par exemple sous la forme d'une plate-forme API du SI, d'assurer la bonne intégration dans le SI, de former les utilisateurs et de les accompagner pour garantir la sécurité. Il est vrai que cette approche demandera de nouvelles compétences à la DSI, donc de l'énergie et des budgets pour convaincre la DG de ce nouveau rôle. 

Et dans la perspective d'un SI de plus en plus ouverts sur des écosystèmes externes avec qui l'entreprise échange des données via des API, ces nouvelles compétences sont finalement les mêmes que pour animer une communauté de développeurs externes et pour développer l'opendata. Comme l'imagine dans le système complexe de la "smart city", et comme c'est déjà le cas pour les API dans le secteur du transport, où elles représentent de nouveaux services numériques et des revenus additionnels.

C'est donc bien une transformation interne ET externe qui est devant les DSI qui sauront en saisir l'opportunité.

En terme de plate-forme, le cabinet Forrester, qui conseille les DSI, recommande depuis 2016 de s'intéresser à ce sujet, sans pousser cependant à la transformation radicale. Les plate-formes "low code" ont donc été benchmarquées et ont ainsi obtenu leurs lettres de noblesse ; ou au moins du sérieux pour être considérées par les organisations des grandes entreprises, souvent frileuses à s'engager dans de nouvelles voies.



Mais attention, car le choix de la plate-forme n'est que la moitié du problème.

Si la DSI n'adopte pas aussi le nouveau paradigme d'une organisation agile, le risque est de rigidifier ces plate-formes avec une gouvernance et des procédures non adaptées, issues de la gestion d'un SI historique pas assez réactive pour tirer de la valeur de ces nouveaux environnements. Et après l'echec de leur mise en place la DSI aura alors beau jeu de dire que techniquement elles n'étaient pas assez solides, ce qu'elle avait démontré par ses études, et qu'il ne fallait pas les choisir. CQFD...

Changer la technique et l'organisation en même temps reste donc toujours une tâche très compliquée sans une volonté venant du haut de l'entreprise et une conduite des changements appropriée.

C'est d'ailleurs certainement le facteur qui freinera l'évolution du "low code" dans les prochaines années. Après avoir rejeté l'internet dans les années 2000, et le cloud dans les années 2010, la DSI a une nouvelle chance pour ne pas rater sa nouvelle place dans l'entreprise amenée sur un plateau : celle de l'usine à logiciels adaptés rapidement aux besoins des métiers et bien intégrée avec les plateformes de déploiements.
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