dimanche 24 mai 2015

DSI@Home: pourquoi j'ai "rebooté" ma voiture

La semaine dernière, comme beaucoup de français, j'ai profité des congés du mois de mai pour partir m'oxygéner à la campagne. Tout commençait bien, jusqu'à la station services près de chez moi, quand après avoir pris de l'essence et vérifié la pression des pneus, ma voiture automatique n'a plus voulu partir. 

Un incident qui m'a projeté dans le futur monde des voitures connectées et de ce que cela va supposer en terme de support aux conducteurs.

Sur les voitures automatiques, vous savez certainement qu'il n'y a pas de levier de vitesses mais juste un mode Neutre, Avancer ou  Reculer. Ensuite la voiture se charge du reste, à savoir de passer les vitesses en automatique. C'est le standard dominant de l'autre côté de l'Atlantique, mais pas celui des pays latins de la vielle Europe.

Mais ce matin en mettant le levier en position "Avancer" le tableau de bord, qui me donne en retour la réalité de l'état de la voiture, m'affiche en position "Neutre". Impossible de repartir, alors que le moteur était en marche et qu'aucun voyant de panne n'était allumé. La voiture ne captait visiblement plus la position réelle de mon levier de commande R/N/A manuel et ne croyait qu'en la valeur numérique en mémoire, en dépit de la position réelle de ce levier. 

Pas de problème je me dis. Un appui sur "Start" , le ON/OFF de ce Grand Picasso C4, va certainement résoudre cette mauvaise blague en redémarrant. Et bien non!

Là on ne peut s'empêcher de penser que les constructeurs étaient allé un peu loin dans le numérique de la voiture (même par GreenSI !). Mes commandes physiques ne sont plus connectées au système logiciel qui pilote le moteur. Heureusement, incident qui survient à l'arrêt sur l'aire de gonflage des pneus d'une station services, avec la liberté de pouvoir réfléchir sur comment résoudre ce problème.

J'appelle mon garagiste, qui, coup de chance, était encore ouvert avant de partir lui aussi en weekend. Il me propose de m'envoyer une dépanneuse. Vous savez ce truc "analogique" qui est censé ramener votre véhicule sur un point centralisé où il va être physiquement inspecté... dans 3 jours après un long weekend.

Là, je me dis que je suis dans un cauchemar numérique et qu'il faut que je réveille mon garagiste!

Pourquoi amener la voiture à la concession alors qu'on est en relation par téléphone? Pour pouvoir brancher le système de diagnostic du véhicule me répond mon garagiste!
Mais ne peut-on pas diagnostiquer à distance? Malheureusement nous sommes dans une situation qu'il n'a jamais rencontrée et que rien n'est encore prévu pour cela en 2015... 

Je suis pourtant convaincu que c'est un problème logiciel et non matériel. Il ne me reste plus qu'à essayer LA solution miracle qui marche souvent avec le numérique, même sans avoir un "écran bleu" sous les yeux: "rebooter" la machine! 

Mais au fait comment on peut "rebooter" une voiture?

Et là, mon garagiste qui a un éclair de génie, et je remercie Citroën de l'avoir formé, me dit qu'on peut essayer de débrancher la batterie. Gardez ça en mémoire, car avec tous les robots et autres objets connectés qu'on nous prédit par milliards d'ici 2020, c'est certainement un réflexe salutaire qu'il va falloir acquérir pour survivre.

Mais débrancher la batterie pendant 30s, pour que toutes ses mémoires (capacités en fait) se vident, n'est pas si simple sur une voiture automatique et "intelligente". 

 Car quand la clef est à l'intérieur du véhicule, la voiture ne se réinitialise pas.

Et oui, c'est un véhicule intelligent. La voiture pense que c'est une situation "normale" de redémarrage "on/off", conducteur au volant, ce que j'avais déjà essayé et ne se réinitialise pas totalement. 

Clef dans la poche en dehors du véhicule, je débranche, j'attends 30s, je rebranche, la voiture se réinitialise, je redémarre, et voilà que tout rentre dans l'ordre. Mon garagiste étant le premier surpris. J'ai depuis avalé des centaines de kilomètres sans aucun problème.

A la veille de l'arrivée de voitures connectées encore plus sophistiquées, cette expérience soulève la question du support utilisateur de ces solutions.

Le réseau actuel des garagistes, pensé pour l'analogique et les pannes mécaniques, n'est certainement pas la solution optimale dans un monde numérique. La voiture connectée amène un potentiel de diagnostic à distance encore non exploité par ce réseau.

Et en allant quelques années de plus dans le futur, on peut quand même se demander pourquoi ma voiture ne m'a pas dit qu'elle avait un problème et qu'il fallait que je quitte le véhicule (avec ma clef) le temps qu'elle réinitialise le système primaire. Et ce n'est pas si futuriste que ça, car on cite souvent l'exemple "big data" de General Electric qui analyse à chaque retour d'un avion, les données du moteur qu'il a vendu au constructeur de l'avion, pour en optimiser la maintenance. La voiture va certainement aussi faire l'objet de ce type de services de diagnostics, si elle sait exploiter le réseau des opérateurs mobiles et les données stockées dans le véhicule. 

D'ailleurs pourquoi la station "services numériques" de 2017 ne proposerait pas en standard le diagnostic de votre voiture devenue numérique et intelligente? Une borne de plus à ajouter à côté de celle de l'aspirateur et du gonfleur de pneus, pour mettre à jour le système d'exploitation de la voiture, détecter la présence de virus ou de "back door" et bien sûr optimiser sa maintenance. Qui sait?

Espérons donc que le concept de “voiture connectée” ne se limitera pas à  un simple accès internet dans le véhicule pour communiquer avec le monde extérieur et écouter sa musique en ligne. L'enjeu des véhicules connectés est aussi le support numérique, de véhicules de plus en plus sophistiqués.

Sinon, il ne nous restera plus qu'à apprendre à rebooter notre voiture régulièrement et croiser les doigts à chaque fois, comme avec les bons vieux PCs. Nostalgie, nostalgie...
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Avec les objets connectés, le "système d'information des particuliers" va continuer à s’étoffer, et le consommateur en devenir de plus en plus acteur, voir manager de ce SI. A la maison, le DSI c'est vous!
C'est le thème des billets DSI@Home débutés en 2013 (voir aussi Ma chaudière est plus intelligente que mon frigo).


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