lundi 23 mars 2015

Eclipse totale du CeBIT

Cette semaine se tenait à Hanovre, en Allemagne, le traditionnel salon CeBIT, qui a longtemps été le plus grand rassemblement autour des technologies. Mais 2015 confirme la tendance de perte d'influence de ce salon dans le domaine des technologies de l'information, comme GreenSI l'avait déjà souligné en 2014.

Est-ce que vous rappelez cette semaine avoir lu un article sur le CeBIT (qui a duré 5 jours)?  Ou avoir vu passer un tweet sur le sujet?

Et quand on y réfléchi, la fréquentation du CeBIT nous confirme l'évolution des systèmes d'information.
Quand il y a 10 ans on alignait les serveurs, les mainframes et la "quincaillerie" lourde (hardware) pour briller a côté des machines outils où l'Allemagne excelle, en 2015 plus personne ne s'y intéresse. Sauf peut être les fournisseurs de Cloud qui fabriquent les plateformes que les entreprises louent en ligne, sans se soucier de savoir quel est le logo sur la machine physique où est hébergé leur machine virtuelle.

Aujourd'hui, le sujet c'est le terminal, plus le serveur.

Et les terminaux de demain seront mobiles, voir simplement des objets connectés. Alors sans aucun doute, les salons comme le CES de Las Vegas en janvier, événement de l'électronique et, entre autres des objets connectés, ou le MWC, Mobile World Congress à Barcelone où sont lancés les terminaux, deviennent les hauts lieux des annonces et de l'innovation IT.

Et quand on parle d'innovation, on pense aux startups et aux multiples lieux qui les accueillent pour y présenter leur façon de penser, souvent disruptive. En France les manifestations FrencTech fleurissent et le rassemblement pour anticiper les tendances de l'Internet c'est LeWeb (maintenant Paris et Londres) qui déplace même les américains.

Et puis il y a aussi SXSW à Austin ("southby" pour les initiés), où Twitter s'était lançé en  2007 au sein de la partie "Interactive" de ce rassemblement au départ... musical. Et SXSW se tient justement la même semaine que le CeBIT.
Alors marquez ces nouveaux salons votre agenda numérique. Les délégations "en masse" de DSI commencent à s'organiser à l'instar de celle du Cigref au dernier CES.

Au CeBIT, les chinois placent leurs pions

Cette année au CeBIT on pouvait également repérer une seconde tendance: la déferlante des sociétés chinoises dans le hardware.
Et loin des clichés du lowcost "Made in China", les entreprises chinoines viennent en Allemagne y chercher leurs lettres de noblesse "Seen in Germany", pays reconnu pour la qualité et la réputation de son industrie.

Huawei par exemple, une société qui assume son positionnement de fabricant de "hardware" est venue y exposer ses dernières nouveautés.

Huawei y a aussi annoncé l'ouverture à SAP de son centre de R&D en Chine, certainement pour optimiser les performances du logiciel avec le matériel. Et on ne peut s'empêcher de penser à SAP Hana et à son concurrent Oracle, qui a racheté le fabricant de serveurs Sun, et produit maintenant des machines Exalitics optimisées pour le BigData.

Lenovo, autre fabricant de matériel informatique était aussi présent, ainsi que Xiaomi, l'étoile montante du mobile qui vient d'annoncer le Mi4 qui pourra marcher avec Android ou Windows10.

D'ailleurs la Chancelière Angela Merkel ne s'y est pas trompée et cette année elle a inauguré le CeBIT avec Ma Kai, l'un des quatre Vice Premier Ministre Chinois et Jack Ma le fondateur du site de e-commerce Alibaba.
Alibaba c'est Amazon et eBay à la fois au niveau des fonctionnalités, mais aussi du potentiel du chiffre d'affaires! 

Jack Ma, visionnaire reconnu, a rappelé dans sa keynote, qu'il y a 8 ans, il avait proposé aux organisateurs du CeBIT d'avoir une version en ligne et que cela s'était soldé par un échec, car l'Internet était vu comme un rival aux salons traditionnels. Aujourd'hui l'Internet tire la transformation digital et avec lui celle de l'Industrie. De l'autre côté du Rhin, où visiblement l'inflation est plus forte que chez nous, on parle déjà de l'industrie 4.0.
Pour continuer d'être visible mondialement sur le thème de la technologie informatique, le CeBIT devra aussi attirer ce qui est l'objet de toutes les attentions: mobile, innovation, software, startup internet,.... 

D'ailleurs cela s'applique aussi à la DSI. Alors si votre DG vous voit plus comme la Direction de la quincaillerie, que la Direction de l'internet, de la mobilité et de l'innovation, il est aussi temps de vous poser des questions... et de vous abonner à GreenSI ;-)

Un salon sous le thème de l'économie numérique

Pour aborder cette transformation, le thème de la cérémonie d'ouverture du CeBIT était cette année "D!conomy", pour "digital economy", la transformation digitale de la société.

A l'instar de notre Président il y a quelques mois, Angela Merkel a lancé un discours sur les objectifs de l'Allemagne pour entamer sa révolution numérique (que GreenSI trouve incantatoire). En voici quelques objectifs:
  • Internet à 50 Mbit/s partout en Allemagne d'ici 2018. 
  • Accès Wifi gratuit dans les espaces publics. 
  • Des infrastructures critiques sécurisées et la cybersécurité comme compétence des industries allemandes
  • Des démarches administratives au niveau national simplifiées par le numérique. 
  • Exonération fiscale pour les business angels. 
On l'aura compris, comme beaucoup d'Etat, l'Allemagne découvre le potentiel du numérique et affiche des objectifs qui auraient été de formidables leviers de croissance il y a 5 ans, mais aujourd'hui ne sont là que pour rester dans la course. Si vous aviez encore des illusions sur les Etats stratèges, espérons que GreenSI vient de vous les enlever définitivement.
GreenSI a quand même relevé dans ce discours l'objectif d'être pionnier sur les véhicules autonomes. Mais quand on aligne Audit, VW, Mercedes et BMW pour ne citer qu'elles, on en attendait pas moins de l'Allemagne de se pencher sur la facilitation des tests de ce type de véhicules, sans invoquer le principe de précaution cher à nos politiques. Les radars de GreenSI sont maintenant tournés vers le prochain salon de l'automobile de Francfort en septembre 2015. 

L'Allemagne va aussi se lancer dans le Cloud!

A un moment où Orange rachète ses parts dans le cloud souverain Cloudwatt, et où l'Etat français annonce qu'il stoppe les financements sur lesquels il s'était engagé, on peut quand même se poser la question de comment l'Europe a raté son "Airbus du Cloud". Tous appellent à plus d'assurance sur la protection des données, au marché unique numérique et télécoms, et chacun, dans son coin, va faire son petit datacenter sans avenir européen.

Aujourd'hui les stratèges sont malheureusement russes, chinois ou entrepreneurs dans la Silicon Valley et ont souvent un coup d'avance. Les autres ne font que jouer les parties qui leurs sont imposées, dans une bataille où ils n'ont même pas toutes les pièces en état de marche, car ils ne savaient pas à quoi elles servaient.
Dommage quand même pour l'Europe...

 
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