
Depuis, Oracle s'est développée par acquisition successives, pas toujours consolidées. Dans les ERP (Peoplesoft, Siebel, JDEdwards,Taleo), dans le middleware (BEA, Weblogic), dans le décisionnel (Hyperion) , dans le e-commerce (ATG), dans le hardware (Sun) et indirectement dans l'open source avec le rachat de Sun (Java, MySQL, Openoffice), entre autres.
Dès qu'une tendance était bien installée, Oracle rachetait un acteur pour y être présent, rattraper son retard, et bizarrement, passait à autre chose.
Vue de GreenSI, la stratégie d'Oracle a toujours été décalée et peu lisible. Finalement Oracle reste pour beaucoup la société associée aux bases de données, à l'image de son siège social en forme de cylindres autour d'un lac très calme, trop calme peut être pour apprécier la transformation numérique des entreprises qui est en marche.

Le décalage stratégique par exemple pour accepter la transformation du Cloud n'a eu lieu, au mieux, qu'en 2011 (Oracle débarque dans le Cloud... et Larry sur Twitter) alors que deux des menaces actuelles du modèle ERP d'Oracle sont déjà bien développées dans le Cloud (Salesforce, Workday) et signent même un accord en septembre 2013 qui défie Oracle.
Sans surprise, les résultats d'Oracle dans le Cloud se font attendre.
Car tous les analystes pensent que cette annonce de départ de Larry Ellison a aussi servi de contre feux pour annoncer des résultats en-deça des prévisions, mais aussi des perspectives floues. Larry aurait donc raté le virage vers le Cloud?
En tout cas, son seul tweet vieux de 2 ans, annonçait le contraire avec un style qui lui est propre pour parler de son concurrent SAP (qui venait de racheter SuccessFactors, et depuis SAP a clairement pris un avantage). Comme quoi Twitter n'est pas une fontaine du bonheur où il suffirait d'y jeter un tweet pour que ses voeux se réalisent...


Finalement, le départ prévisible de Larry Ellison (même si les annonces disent qu'il reste Chief Technology Officer) va peut être créer un vide qui pourrait réveiller ce géant aux cylindres d'argile.
Le duo qui va le remplacer, Safra Catz et Mark Hurd (ex HP) va donc devoir définir une stratégie, pour ce qui ressemble de plus en plus a un conglomérat informatique, exposé sur tous les fronts de l'obsolescence technologique et au prise avec des acteurs beaucoup plus agiles que lui.
Nombreux points communs
avec IBM en 1993 quand Louis Gerstner a repris la main alors que BigBlue
était au plus mal. Mais contrairement à IBM, le problème d'Oracle,
n'est certainement pas le manque de trésorerie (40 milliards) mais bien le
manque de stratégie. Et Oracle a pour l'instant choisi d'être piloté par des
hommes du sérail et non un outsider qui aurait la voix de leurs
clients.
L'intégration de Sun a testé une synergie
entre le décisionnel (in-memory) des données des ERP, le hardware et le
software, et a produit l'offre des machines Exalytics taillées pour la performance et le bigdata.
Certainement deux problématiques qui attendent les entreprises numériques. Mais
cette stratégie de décolle pas alors qu'elle a été portée par le VRPN°1
d'Oracle, son CEO.
Le problème c'est que ces machines arrivent
a un moment où le cloud banalise la puissance "on demand". Alors pourquoi
acquérir du matériel pour cela? A la limite, "vendez les a mes fournisseurs
d'infrastructure", se dit le DSI agile. C'est certainement une des raisons des
pertes récurrentes de la division hardware qui plombe les résultats d'Oracle
depuis le rachat de Sun.
En
tant que DSI n'oublions pas que notre destin est lié à celui de nos
fournisseurs. Et Oracle étant très présent dans nos infrastructures,
gardons sur notre radar les challenges qui attendent cette société:
- L'open source:
aussi incroyable que cela puisse être, Oracle est (par
hasard?) avec Java, Javascript et MySQL, positionné comme l'un des acteurs qui
peut construire un modèle neuf pour l'open source dans l'entreprise.
Mais cela lui demandera de renoncer a deux choses: le niveau de
profit de ses logiciels car l'opensource est un monde collaboratif de services,
et l'acceptation que la base de données doit rester... une base de données (sans
code ou procédures stockées).
- No-SQL: c'est la fin des bases de données relationnelles et
Oracle a jeté un pont vers Hadoop avec Cloudera. Franchira t-il le
Rubicon?
- In-memory: c'est l'évolution stratégique des bases de données et SAP a
pour l'instant articulé une stratégie crédible. Oracle met toutes ses
forces dans la version 12 de sa base de données, à suivre.
- ERP 2.0: ce sera du
SaaS, dans le Cloud, collaboratif et social, avec une stratégie multi-terminaux
(mobilité) même si cela ne plait pas à Larry qui visiblement ne doit pas être un
adepte de GreenSI vu le nombre de billets sur ce sujet.
Les multiples stratégies Oracle Applications ces dernières années, comme Fusion, sont restées fumeuses ou disponibles que pour de grands clients pouvant s'offrir les experts. Mais fumée n'est pas nuage. L'articulation d'une stratégie ERP et Cloud claire, pour pérenniser les investissement Oracle Applications des entreprises, est attendue. Elle va même devenir de plus en plus critique avec le temps.
- Serveurs: rachat de Sun et maintenant on fait quoi? C'est le point le plus critique dans les résultats d'Oracle.Mais surtout, le refus de reconnaître les machines virtuelles pour les licences est certainement en 2014 un archaïsme qui ouvre des boulevards à ses concurrents et met une épée de Damocles sur ses clients. Une position qui démontre, que finalement, Oracle n'a toujours pas compris le Cloud.