lundi 20 mai 2013

E-commerce: faut-il encore des magasins physiques?

Avant tout était simple. Mais c'était avant... le cloud, le social et le mobile.

Au début de l'internet des e-commerçants "pure players" pleins d'idées et de capital investissement déclaraient la guerre a des mastodontes du commerce ("bricks & mortar"), qui n'avaient pas vu venir l'Internet depuis leurs magasins physiques.
Des magasins dont les emplacements avaient été soigneusement étudiés pour maximiser leur exposition dans les zones de chalandise. Un concept totalement dépassé dans un monde numérique ou tout le monde est a un clic de son concurrent, et depuis peu, y compris en mobilité avec son smartphone.

Puis est arrivé un modèle hybride ("click & mortar") développé par des "pure players" qui ont commencé par ouvrir des boutiques physiques, principalement pour que le client puisse "toucher le produit" (showroom, livraisons, ...), mais surtout par des commerçants qui ont lancé leur magasin en ligne, en plus de leurs autres implantations. Le site en ligne de la Fnac, lancé en 1999, est rapidement devenu le plus gros chiffre d'affaires de tous les magasins et réalise aujourd'hui 7% des ventes, soit la taille de huit magasins de taille moyenne.

Et pour ceux qui n'avaient pas l'expertise (ou la DSI ?) pour lancer un site de commerce en ligne, la fragilité de jeunes pousses lancées en très grand nombre, a facilité les acquisitions de startups, sans trop se poser la question de leur intégration dans le modèle global entre le clic et le mortar. 

Qui se souvient en Mai 2000 de l'acquisition de Marcopoly par un certain France Telecom (Wanadoo)? Marcopoly un vendeur de produits électroménagers en ligne ayant lui-même racheté Centralnet un distributeur de produits informatiques. Un France Telecom Multimedia qui fusionne ensuite l'activité Marcopoly avec Alapage, le libraire en ligne de son portefeuille, pour tenter de créer un champion français avec le modèle de distribution d'Amazon... mais sans succès. C'est finalement Rue du Commerce qui reprend le tout en 2009 et assure la continuité des commandes d'une activité dont Orange voulait se débarrasser. Ne devient pas e-commerçant qui veut. On souhaite plus de réussite à la stratégie future de sa participation dans Dailymotion (facile!).



Mais avec l'annonce, cette semaine, par Dyxon Retails, le numéro deux britannique de la vente d’électroménager et électronique grand public en Europe, de se séparer de sa filiale de e-commerce Pixmania, on peut se poser la question sur ces difficultés: conjoncture ou modèle économique du "clicks & mortar" dépassé.

Surtout après l'annonce par Surcouf, distribution de produits informatiques, de fermer d'ici 2014 ses 336 boutiques de distribution de matériels et services de téléphonie, Game, le réseau de boutiques de distribution de jeux vidéos, qui est en  grande difficulté depuis au moins 2 ans, et bien sûr Virgin la chaîne de produits culturels dont le propriétaire (encore un anglais) veut se séparer de sa branche française. Et GreenSI en oublie certainement beaucoup d'autres en France sans compter l'international.

Quand on regarde le bilan e-commerce de la FEVAD du 1er trimestre 2013 (fédération de la vente à distance) qui a été publié cette semaine, on constate des ventes en hausse de 14% avec un recul du panier moyen expliqué par la crise et la baisse enregistrée par l'Insee du pouvoir d'achat. Donc une fréquentation des sites qui a explosé pour compenser cette baisse du panier moyen et délivrer la croissance des ventes. Le e-commerce se porte bien. Et le paiement en ligne et sur mobile tout aussi bien.

Alors faut-il encore avoir des magasins physiques ?

C'est la question que s'est certainement posée Best Buy, distributeurs d'électronique et d'électroménager diversifié aux États-Unis, quand les clients venaient dans ses magasins voir les produits, armés de leur smartphone. Ils n'avaient qu'un code barre a scanner pour trouver le meilleur prix sur Internet... mais surtout sur Amazon. Et même plus terrible peut-être, géolocalisation aidant certainement, des promotions étaient proposées par Amazon en cas d'achat dans les X minutes pour inciter à passer la commande dans le magasin. C'est le "showrooming", bienvenue dans un monde où vos magasins sont devenus les showrooms de vos concurrents. On l'a déjà dit, mais on est tous a un clic de son concurrent dans un monde numérique.
 
Suite à l'effondrement de son cours de Bourse l'an dernier, la réponse de BestBuy c'est la garantie de prix (dans les 15 jours), des conseils de vendeurs qui rappellent la Fnac de ses débuts (mais ils agissent aussi sur les réseaux sociaux) et un service après-vente remis à l'honneur comme chez notre Darty national. Le marché à l'air de croire à la formule Prix + Logistique + Service, et l'action est repassée de $13 à $27, à suivre...
Car la force d'Amazon c'est aussi sa logistique, entièrement automatisée. Un tel atout concurrentiel qu'Amazon a finalement racheté la société Kiva System qui la fournissait en robots, elle et sa concurrence. On est jamais trop prudent! Amazon qui avait aussi racheté Zappos, connu pour l'excellence de son service client. Visiblement Prix + Logistique + Service est aussi une formule qui intéresse les "pure players".

Mais cette convergence du modèle numérique et physique ne s'arrête pas à la question des magasins classiques. On a pu voir en 2012 l’apparition de nouveaux points de ventes "virtuels", comme ce cube de 9m2 déposé par Carrefour à la Gare de Lyon Part Dieu (en test temporaire), pour y scanner ses produits avec son smartphone et se les faire livrer par le site en ligne ou les récupérer dans un "drive".

Les "drives", encore une forme hybride de magasin "clic and drive" qui se développe fortement en ce moment autour des zones a forte densité de population mobile. Ce qui donne des idées à d'autres de généraliser le concept de "drive-in", par exemple aux restaurants. Storific permet de regarder le menu, commander, payer (sans passer par la caisse grâce au "wallet Paypal" intégré), puis récupérer son repas à un comptoir dédié aux retraits mobiles pour ne pas faire la queue.

Et côté numérique on n'est pas en reste d'innovations avec la géolocalisation à l'intérieur des bâtiments et donc des centres commerciaux ou des magasins. Des applications qui s'inscrivent dans le domaine de la réalité augmentée, qui permettent de bénéficier de toute l'information d'une base de données (emplacements, prix, promos...) directement sur son smartphone en "'ajoutant aux informations visuelles". MyWay de ADP permet par exemple de s'y retrouver dans les services des terminaux de l'aéroport Charles de Gaulle. 

De son côté Google a lancé ses campagnes de "crowdsourcing" pour faire des recherches dans les bâtiments, vous pouvez allez y ajouter votre plan (floorplans).

Dans le même genre, mais depuis la rue, SoCloz est un assistant pre-shopping permettant à des internautes de chercher des produits en ligne et de repérer les magasins qui les ont en stock. Idée intéressante, mais ce ne sera pas simple de réussir sur ce créneau tant cette promesse est liée aux SI hétérogènes de milliers d'acteurs.

Alors, pourquoi ne pas commencer à imaginer de l'animation commerciale sur le point de vente plus ludique, plus interactive. En lieu et place du Monsieur Loyal qui nous casse les oreilles pendant toute la durée de nos courses, pour nous amener dans son rayon ou écoutez bien, le gigot est encore à -30% dans les 15 prochaines minutes. Alors qu'une chasse au trésor pour trouver des œufs de Pâques gratuits dans les rayons avec son smartphone, mettrait une sacrée ambiance et laisserait un souvenir impérissable. Sans parler des Google Glasses qui pourraient quand même nous aider à accomplir la corvée du samedi ;-)

Drive, showroom, animation,... le magasin physique a donc de nombreux atouts devant lui et on est loin de les avoir tous explorés. Mais ce qui semble sûr, c'est qu'il faudra le coupler au numérique dans le magasin, et réciproquement sur le site en ligne, il faudra se coupler aux points de service physiques.

Et le 17 juin ce sera l'ouverture en France (après l'Allemagne et le Royaume Unis cette semaine) de Hello Bank, la banque "full-service" et mobile de BNP Paribas. Une banque accessible partout en Europe, depuis son smartphone ou sa tablette, et bien sûr sans agence, comme ses concurrentes les banques en ligne. Des banques en ligne qui n'hésitent cependant pas a créer des "lieux de convivialités" et de conseil comme ING à l'Opera, pour tisser des liens physiques avec ses clients. Comme quoi la distribution n'est pas la seule concernée par la quête de ce nouveau modèle hybride digital-physique.

Alors, comme nous dit Carrefour sur son site corporate, un sourire fait toute la différence? Peut-être, ou peut-être pas...








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