lundi 28 septembre 2015

DSI: la fracture?

Cette semaine j'ai fait un mauvais rêve. Il faut que je vous en parle!

Je me réveillais 5-7 ans en arrière, dans une économie où le Cloud et l'innovation n'étaient encore que de faibles lueurs à l'horizon de la DSI, quand les projets étaient plus des jeux de pouvoir, parfois téléguidés par de puissants fournisseurs, que des volontés stratégiques de transformation de l'entreprise.

A cette époque, l'avancement hiérarchique se mesurait à la taille du budget obtenu et dépenséEt comme les budgets informatiques étaient toujours croissants, il n'y avait mécaniquement que des personnes ultra performantes à l'informatique, avec toujours plus de budgets et de responsabilités. Au mieux, on demandait de couper de 5% son budget ou de stabiliser l'augmentation. De toutes façons, les métiers n'avaient pas le choix. Et puis c'était confortable. Car avec plus de moyens, le pilotage a le temps de tranquillement faire face aux imprévus.  

C'était une époque où voir et manipuler les applications, comprendre leur architecture et leur potentiel, n'intéressait ni le DSI, ni ses équipes. Les décisions se prenaient sur des postures via une bataille d'influence avec les métiers, quand ce n'était pas à l'intérieur même de la DSI. Et puis la DSI n'aura pas à utiliser les systèmes qu'elle produit; la mobilité et les smartphones n'étaient pas encore là pour amener plusieurs façons de les utiliser en conditions opérationnelles, voire d'imaginer des innovations. 


Car dans mon rêve, la DSI n'était pas partie prenante avec le business.

C'était un centre de coûts, au mieux un fournisseur interne, assis sur le monopole et le confort de sa relation, lui permettant par exemple de se retrancher derrière "la validation des besoins des clients par la MOA". J'imagine le maître d'ouvrage devant le client, surtout en B2B, "Euh, non désolé ce n'est pas un besoin, allez voir chez nos concurrents, car ça nous ne ferons pas...".
Bien sûr ce n'était qu'un rêve! Le rêve d'un autre âge, quand les conditions économiques étaient différentes, la technologie moins porteuse de ruptures, et moins disponible aux nouveaux entrants.

Car en 2015, le Cloud est là. Et la DSI l'apprivoise pour fabriquer ses futures plateformes.

Elle est impliquée dès le départ dans le processus commercial pour voir comment le SI peut aider l'entreprise à se développer et à innover.

Elle développe une relation de partenaire avec les métiers et assume la responsabilité du pilotage des plateformes numériques qui délivrent les nouveaux services aux clients de l'entreprise.

Les plateformes se construisent à coût marginal, en projet incrémentaux et agiles, au fur et à mesure de l'expression de besoin directement par les clients. Les applications sont testés et essayés au quotidien pour anticiper l'expérience utilisateur et l'améliorer. La seule satisfaction des clients, traduite en revenus, sert de "maîtrise d'ouvrage" commune aux Directions métiers et à la DSI. L'alignement parfait entre la stratégie et le SI.

Partant du client et d'un environnement commercial compétitif, les projets sont conçus "design to cost" pour apporter de la valeur au bon niveau de prix. Les économies d'échelle et la mutualisation ne sont plus une option pour l'entreprise, la transversalité entre métiers non plus, car les plateformes mondiales des géants du net ont rendu le cloud public compétitif. La DSI l'utilise, mais construit aussi son Cloud privé pour y mettre les applications critiques, dont la disparition (par exemple la clef sous la porte du fournisseur, ou le doublement du prix) mettrait en péril l'entreprise ou son avantage compétitif. Le Cloud est devenu hybride, public et privé, et sert de terrain de jeu aux équipes SI et à leurs nouveaux fournisseurs.

Vers une fracture à la DSI?

Aujourd'hui à la DSI, ce mauvais rêve, on peut aussi le faire éveillé.
Par exemple, quand une équipe encore le nez dans le guidon d'une application pensée dans l'ancien monde, rencontre à la machine à café ou dans une salle de réunion, une équipe engagée dans la construction rapide et agile des actifs de l'entreprise numérique. Elles commencent à ne plus parler le même langage et à ne plus se comprendre. 

La faute donc au numérique qui entraîne une séparation du SI en deux ("bi-modal IT" chère à Gartner - voir La guerre des CIOs) avec une partie agile pour la conquête commerciale et la transformation numérique, et une autre héritant d'un historique, d'une dette technique et de processus moins au coeur (pour l'instant) de cette économie numérique.

Les priorités et la gouvernance changent, ou se renversent, "FLIP", comme le présente Gartner dans le schéma ci-après. 


L'incompréhension qui peut s'installer entre ces deux mondes du SI est similaire à celle des chauffeurs de taxis bloquant des VTC dans la rue, voire détruisant leur outil de travail...

Et dans un domaine proche des taxis (le co-voiturage), la même semaine, BlaBlaCar lève 200 millions et devient la première startup française à briguer le statut de "licorne" (valorisation de plus d'1 milliard), quand le conseil constitutionnel confirme l'interdiction d'Uber Pop en France.
Pourtant la plateforme SI sous-jacente à toutes ses formes de transport est relativement similaire.

Elle permet à des chauffeurs de proposer leur trajet planifié à l'avance (BlaBlaCar) ou à des chauffeurs professionnels, ou des particuliers (UberPop), d'aller prendre des clients, sur des points fixes (stations de taxis) ou géolocalisés (VTC). D'ailleurs les plateformes téléphoniques des taxis ont récemment fait évoluer leurs applications mobiles et même leur modèle économique (forfait des taxis de nuit). Tout cela converge techniquement.

Ce n'est donc pas l'application qui fait la différence, mais bien le modèle économique sous-jacent et les contraintes réglementaires (gouvernance) que l'on souhaite s'imposer.


De retour à la DSI, de vouloir piloter le SI avec une finalité unique va révéler des tensions qui seront proches de ce que l'on a pu observer avec l'émergence des nouveaux modèles numériques.

Certains pouvant se retrancher derrière des arguments "légaux" mais qui ne sont plus adaptés à l'intérêt de l'entreprise. Réciproquement ceux qui construisent les nouvelles plateformes vont devoir enfreindre des lois de gouvernance devenues obsolètes.

Il va certainement y avoir urgence pour la Direction Générale à traiter la question de la gouvernance de la DSI, quand la dualité du SI augmente et que son émergence sera essentielle pour la réussite de la transformation numérique de toute l'entreprise.

Peut-être une mission à confier aux Chief Digital Officer, membres du Comex, qui s'installent dans les Etats Majors du CAC40 à ce qu'il parait. En tout cas côté DSI de l'Etat ça c'est tranché cette semaine. C'est Henri Verdier directeur d'Etalab (la partie agile) qui devient DSI, après la fusion d'Etalab et de la Disic, renommée Dinsic pour l'occasion.

Le N du numérique est reconnu et intégré dans une direction informatique unique. Reste à conduire le changement auprès des équipes maintenant et poser une gouvernance réconciliant la double attente d'innover et de préparer demain, tout consolidant et réduisant les couts hérités d'hier.

lundi 21 septembre 2015

Internet des objets: Lords of the (connected) rings

A la conférence annuelle Dreamforce 2015 cette semaine, Marc Benioff le CEO de l'américain Salesforce a annoncé une nouvelle offre: IoT Cloud.

Une plateforme pour les connecter tous! Ou, comme le présente Salesforce, pour venir y connecter l'internet des objets avec l'Internet des clients; pour pouvoir y exploiter la puissance de l'analyse de données dans le Cloud et via des automatismes, y engager de manière proactive la relation avec ses clients. 

Un peu avant l'été, à l’occasion de Sapphire Now, l'européen SAP a aussi annoncé sa plate-forme pour l’Internet des objets: Hana Cloud Platform.
Hana c'est la base de données "in-memory" de l’éditeur, appelée en tant que service pour stocker et traiter en temps réel les données, augmentée de nouvelles fonctions de gestion propres aux objets connectés eux mêmes et à leurs communications. La cible de SAP: exploiter les données des capteurs au sein des applications métiers.

La bataille pour la plateforme qui connectera tous les objets de l'entreprise a visiblement commencé.

Les grands éditeurs très (trop?) présents aux côtés des entreprises voient là une riche opportunité de les accompagner et de les convaincre de fabriquer d'utiliser leur plateforme SaaS, Une plateforme qui sera le nouveau canal de communication en temps réel et intelligent de l'entreprise numérique, avec ses clients, ses partenaires et supportant ses processus. 

Mais est-ce la seule alternative ? Et si les entreprises fabriquaient elles-même leurs propres plateformes avec l'aide d'une communauté, de moins en moins mystérieuse pour les DSI ?

 
En 2020, il y aura selon les analystes entre 30 et 50 milliards d'objets connectés. Des objets cinq à dix fois plus nombreux et des centaines de fois plus "bavards". Certains spécialistes pensent que la limite à la croissance des objets connectés sera l'énergie pour les alimenter. Mais GreenSI se demande aussi si l'architecture actuelle du Cloud et des SI, le stockage de données et les réseaux, pourront supporter ces volumes à des coûts maîtrisés.

Car derrière la simplicité du discours marketing de ces géants du logiciel, et les paillettes qui l'accompagnent, se cachent une infrastructure physique et des opérateurs de télécommunications. Avec l'émergence de nouveaux acteurs comme SigFox, ou l'évolution d'acteurs historiques comme Bouygues Telecom, ou Orange (qui rejoint la technologie de Bouygues Telecoms) qui déploient des réseaux permettant de réduire l'énergie et les coûts par rapports aux réseaux mobiles actuels. 

Les 15 ans du protocole WiFi ce mois-ci sont aussi là pour nous rappeler que dans la maison et pour les tablettes, c'est bien la combinaison box-wifi-bluetooth qui a gagné la bataille des usages (connexion locale puis filaire) et non la connexion mobile, comme certains pouvaient le penser il y a 10 ans (voir un billet 2014: La maison connectée et les telcos déconnectés).

Les "apps" sur le mobile ont terminé le travail en utilisant la puissance toujours plus grande des terminaux, et en déportant et simplifiant les applications sur la tablette avec de simples API (voir: Après le PC habituez aux Apps, elles sont là pour durer).  L'informatique est de plus en plus répartie.

Ces objets connectés vont produire des quantités massives de données 24h sur 24, 7j sur 7. Cet afflux de données va demander une efficacité redoutable pour l'infrastructure de données et les communications. Or il sera certainement difficile de fonctionner en permanence en temps réel. Il est donc vraisemblable qu'un "middleware" va se charger de l'acheminement et offrir des services à plus forte valeur ajoutée.
Pour GreenSI, le scénario le plus probable autour des architectures pour les objets connectés est donc :
  • que la majorité des milliards d'objets connectés va d'abord communiquer avec d'autres objets,
  • puis via des réseaux "low cost & low energy" répartis, souvent de proximité, 
  • bénéficier d'infrastructure middleware pour fiabiliser les communications, 
  • et peu s'appuieront sur les architectures que nous avons en tête aujourd'hui pour les smartphones (une application connectée en direct sur le Cloud via un opérateur mobile) et qui est vantée par les discours marketing des éditeurs SaaS.
De plus, de nombreux objets connectés de demain vont avoir un microprocesseur ou équivalent, comme la voiture autonome, les robots domestiques, certainement les prochaines versions des montres connectées, etc. Donc de la puissance de calcul (car alimentés) qui sera utilisée par du logiciel permettant la prise de décision en local, ce qui est en décalage avec la vision très centralisée des éditeurs de plateformes SaaS. Au mieux le SaaS apportera la vision globale sur un ensemble d'objets (des tableaux de bord) mais ces derniers agiront de façon autonome, avec peu d'informations centralisées. 

On va donc assister à l'émergence de nouvelles architectures. Des architectures incluant du logiciel embarqué et des API pour l'interopérabilité. Elles permettront de gérer les volumes de données annoncés et de produire les expériences utilisateurs uniques attendues.  
La vision centralisée des données qui remontent dans le Cloud, traitées par l'ERP ou le CRM, ne concernera qu'une petite partie des usages, mais elle aura des coûts de stockage et de service certainement plus élevés, qui suffiront à assurer la fortune de quelques "lords" du logiciel en SaaS comme Salesforce ou SAP.

C'est bien sûr une vision que vous pouvez challenger dans les commentaires!

Dans ce nouveau monde que "deux tours" veulent se partager, GreenSI croit beaucoup plus à la "communauté de l'objet connecté" qui pourrait émerger: l'open source.

Qui mieux que l'open source pourra assurer aux entreprises et aux startups, avec une plateforme aussi stratégique au centre de leurs nouvelles offres numériques:
  • la propriété, partagée au sein de la communauté, donc une promesse de pérennité et de coûts de maintenance mutualisés,
  • la sécurité, la réponse à la faille HearthBleed a montré la réactivité de la communauté, surtout quand elle est supportée par les GAFAS,
  • le support, avec des légions de freelance et sociétés qui pourront se former sur des technologies ouvertes,
  • l'expertise technique, avec 20 ans de bons et loyaux services des couches logicielles d'infrastructure comme Apache, des frameworks php, et plus récemment la maîtrise des bases de données massives avec Hadoop ou Spark (fondation Apache).
N'oublions pas non plus que l'innovation est aujourd'hui tirée (et financée) par le grand public. Or, les plateformes grand public américaines, comme Twitter, Google, et Facebook, sont friandes de maîtriser leur technologies, et pour cela investissent massivement dans l'open source.

Le cabinet BlackDuck a publié une étude l'an dernier sur les domaines où l'open source semblait le plus pertinent. Les couches intermédiaires comme les frameworks, le middleware, les OS et les outils de développement (tous en bleu sur l'image) sont certainement les premiers domaines où les projets vont se concentrer. 

 

Dans deux mois se tiendra à Paris l'Open Source Summit, et au sein de ce sommet la conférence OpenCIO Summit dédiée aux DSI. Ce sera certainement le bon endroit pour faire le point sur les technologies open source à faire rentrer dans la DSI, en attendant le "retour du roi" qui ramènera la paix dans ce royaume qu'est l'internet des objets; aujourd'hui technologiquement risqué, mais plein de promesses pour l'avenir.

lundi 14 septembre 2015

Un iPadPro pour l'entreprise: et alors?

Cette semaine s'est tenue la conférence d'Apple, attendue par tous les adeptes (ou disciples ?) de l'iPhone, pour lever le voile sur ses deux prochaines moutures 6s et 6s Plus. D'ailleurs une étude a montré que les utilisateurs d'iPhone n'étaient pas représentatifs de la population, mais bien sur représentés parmi les CSP+. Ce qui dans un monde toujours bipolaire (iOS, Android) est une bonne nouvelle pour les marques de luxe puisque cela leur amène une direction claire sur leur stratégie mobile ("iPhone first" voire "iPhone only") et une confirmation pour ceux qui visent le "service public pour tous" de bien exploiter au maximum Android.

Mais ce ne sera pas l'objet de ce billet. On retiendra cependant que la vitesse d'innovation sur le poste de travail mobile des salariés équipés d'iPhone est de une version par an. Ce qui d'ailleurs pose un problème à la DSI pour suivre comme le montre un autre chiffre, le taux de mise à jour des iPhone gérés par l'entreprise est très faible avec ses risques (vulnérabilités non patchées, anciennes versions plus compatibles avec les nouvelles applications...) Malgré les efforts d'Apple pour avoir mis en place un programme d'achat au volume et la possibilité d'avoir un App Store Pro.

En marge de l'émergence de ce nouveau soleil sur la planète Apple, la rumeur d'un iPad pour les Pros en novembre a été confirmée. Une tablette qui, pour GreenSI, est plus qu'un produit mais bien un signal intéressant pour toutes les entreprises et le positionnement d'Apple dans l'entreprise.

Pourtant, nous venons de voir qu'entre l'entreprise et iOS, il restait des marges de progrès à accomplir. Et les annonces d'équipements d'iPad pour quelques catégories de salariés très limitées, comme les pilotes d'une compagnie aérienne, les commerciaux d'une banque d'affaire, où les vendeurs de certaines boutiques haut de gamme, restent finalement une exception. Même si en revanche du côté des salariés les produits iOS sont très utilisés en entreprise (sans passer par la case DSI, ou juste pour l'accès à Internet).
Apple ne peut-il compter que sur cette stratégie du cheval de Troie pour pénétrer l'entreprise?

Il est cependant vraisemblable que dans sa mouture actuelle, l'iPadPro ne restera qu'un produit de niche pour la clientèle traditionnelle d'Apple, les inconditionnels du graphisme, de la musique et de la vidéo, qui étaient encore équipés de Mac quand Apple était au bord du gouffre en 1997: agences de communication, graphistes, éducation, professions libérales,...
Mais ce que retiendra GreenSI c'est plusieurs messages forts pour l'entreprise et pour ceux en charge de ses systèmes d'information:
  • Oui, Steve Jobs avait dit qu'un style ou qu'un iPad plus grand était stupide. Et cela n'a pas du être simple pour le concepteur de l'iPad Pro d'annoncer "Chef j'ai une idée, et si on faisait un iPad plus grand"...
    Mais visiblement la force d'Apple est aussi de se remettre en question. Un signal à écouter pour l'entreprise qui n'a pas toujours réussi a bien fonctionner avec un Apple totalement dévoué au grand public et donc à l'utilisateur.
  • Oui, Apple est sérieux sur ses alliances pour rentrer dans l'entreprise. C'est Kirk Koenigsbauer, le patron de Microsoft Office, un incontournable dans l'entreprise, qui est venu créditer la volonté d'Apple de fournir des outils de productivité pour les salariés. Accueilli parTim Cook par "qui connait mieux la productivité en entreprise que Microsoft ?".

    Là encore une rupture par rapport à Steve Jobsqui mettait plutôt Microsoft du côté "obscur de la force"... Et puis Microsoft a accepté de venir. Alors que la stratégie Windows10 déployée semble aller à l'encontre d'une diffusion d'iOS dans l'entreprise, qui viendra en limiter la partie mobile. Cela montre une plus grande ouverture de Satya Nadella, aux commandes de Microsoft, pour répondre aux besoins de ses clients entreprises.

    Mais on peut aussi l'interpréter comme un retour d'ascenseur d'Apple à un Microsoft qu'il a sauvé il y  a 12 ans en entrant à son capital et surtout qui a toujours continué à investir sur la plateforme Mac pour ses versions d'Office. Certainement en y perdant de l'argent puisque la base installée était réduite. Aujourd'hui dans le mobile c'est WidowsPhone qui est la base installée réduite.

    Après les accords avec IBM pour rendre disponibles les applications de l'entreprise sur iOS (programme IBM Mobile First for iOS: décisionnel, RH,...), c'est bien avec tout un jeu d'alliances qu'Apple articule sa stratégie pour s'ancrer plus fortement dans l'entreprise. La stratégie du cheval de Troie via les salariés n'est plus la seule.
  • Oui, la tablette en entreprise est un vrai sujet. Et Apple prend le risque de cannibaliser ses propres ventes de Mac Air pour le montrer. Ce sujet c'est celui de la mobilité et des nouvelles ergonomies, quitte à rajouter un clavier et un stylet. Et au siège de Google, nouvellement renommé Alphabet, on a du beaucoup rire en consultant le site d'Apple mis à jour après la keynote, et de constater qu'ils restaient leader de l'innovation;-)

    Le message de l'iPadPro, la DSI devrait interpréter en partant de l'utilisateur, de l'ergonomie, puis de descendre vers les applications avec bien sûr la question stratégique de l'architecture et de l'accès aux données (multi-terminaux, sécurisation, API,...). Apple irait même plus loin et ajouterai un effet "whaou" comme le dit Katharyn White dans soninterview sur CBR sur la relation entre IBM et Apple pour la construction d'applications mobiles.

    Et non pas de lancer un appel d'offre pour choisir tel ou tel système, de GMAO par exemple pour les agents mobiles sur le terrain, puis de constater après coup que l'éditeur retenu est en retard sur la mobilité, qu'il impose ses standards, voire qu'il verrouille ses données.
    Et puis pourquoi la productivité serait un domaine réservé aux opérationnels sur le terrain et qu'on ne pourrait pas trouver de nouvelles ergonomie et façon de travailler avec de nouveaux équipement dans le SIRH ou en Finances ?
  •  
  • Cela va être tout l'enjeu des tablettes mais aussi des objets connectés que l'on pourrait imaginer pour aider pro-activement les salariés à faire leur travail.

    Il est peut-être temps que la stratégie informatique quitte une approche par grands domaines fonctionnels verticaux cloisonnés pour basculer sur une approche plus horizontale et transverse, avec l'ergonomie d'accès aux données en ligne de mire. L'application n'est plus qu'un ensemble d'Apps sur cette architecture. D'ailleurs GreenSI vous en avait déjà parlé en 2012 (Après le PC, habituez vous aux Apps, elles sont là pour durer).

    Oui, cela remet en cause les approches intégrées des ERP (ce sera pour un autre billet). D'ailleurs SAP ne s'y est pas trompé et est en train d'adopter cette stratégie avec Hana et la mobilité. Côté Oracle Applications c'est quand même plus flou...
Est-ce qu'on est pas en train d'observer le renforcement d'une nouvelle stratégie d'ancrage dans l'entreprise par Apple?

C'est certainement une piste à prendre en compte pour les DSI, et à minima un signal de rappel sur la refondation de l'architecture d'entreprise pour intégrer, nativement, le multi-terminal dans les applications métiers. Ce sera tout l'enjeu de l'amélioration de l'expérience utilisateurs.

Go mobile first!

lundi 7 septembre 2015

Automobile: une petite prise de données et toute une industrie émerge

Dans un billet précédent, après avoir rebooté une voiture automatique (DSI@Home: pourquoi j'ai rebooté ma voiture?),GreenSI a décidé d'explorer le futur numérique de la voiture.
Et de se poser la question: est-ce qu'on est pas en train d'observer pour la voiture ce qui est arrivé au mainframe il y a 30 ans avec l'arrivée du PC, c'est à dire une totale explosion de l'ecosystème de son industrie, rendue possible par le logiciel et les données.

Sans aucun doute, les voitures autonomes et les voitures connectées sont le buzz du moment. L'Idate estime à 420 millions, le nombre de voitures connectées d'ici 2018, dans 3 ans. Mais ce qui intéresse GreenSI c'est la myriade d'acteurs "inconnus" de l'industrie automobile, qui émergent et qui sont en train de changer cette industrie.

Avez-vous déjà entendu parler de Xee en France ou de DashZubieMojio, et encore Automatic aux Etats-Unis?

Déjà, fin 2013, GreenSI faisait le constat que Google était aussi crédible, aux yeux du public, pour vendre des voitures, que des marques centenaires comme Peugeot, Renault ou Ford (Numérisez-vous vite avant que les Techs companies ne prennent votre business). Depuis, Tesla a montré qu'un nouvel entrant pouvait directement arriver dans le haut de gamme, avec des prix qui commencent à 75.000€ pour le modèle S. Voilà pour le "hardware", mais aujourd'hui on assiste à l'émergence d'une myriade de start-ups autour du software.

L'idée de Xee ou d'Automatic, c'est un boitier qui se connecte sur la prise de diagnostic de la voiture. Kesako?
Et bien j'ai eu la même réaction et je suis allé sous le volant de ma voiture regarder cette prise utilisée par les garagistes pour récupérer toutes les données de la voiture et établir un diagnostic avec une "valise ordinateur". Cette prise existe bien et son protocole d'échange indépendant des constructeurs, est normalisé pour la majorité des modèles, et ce depuis presque 20 ans.

Petits cachottiers ces constructeurs..
.
Voici une opportunité d'innovation qu'ils ont dans les mains et qu'ils n'exploitent pas avec leurs clients finaux, mais uniquement avec leur réseau.

Car il suffit d'un smartphone connecté à un boitier mis sur la prise (en Bluetooth par exemple), pour remonter ces informations dans le "cloud" en temps réel, et en faire des applications intelligentes. On peut même court-circuiter le smartphone pour la remontée d'informations en mettant une carte SIM dans le boitier et un GPS (comme Mojio). Là c'est une opportunité manquée par les opérateurs de télécoms mobiles à la recherche de services, qui d'ailleurs connaissent déjà la localisation de la voiture, de ne pas être aller chercher avec de l'open innovation, cette donnée délaissée par l'industrie automobile.

 

Vous l'avez compris, c'est la capacité a récupérer ces données, les traiter avec des algorithmes adaptés, et en restituer de la valeur ajoutée au client final via son smartphone, qui a de la valeur.

Dans les services offerts par ces start-ups qui se lancent dans l'exploitation de ces données on trouve :

  • la remontée des problèmes techniques... avant d'aller voir votre garagiste,
  • l'alerte si vous avez laissé les phares allumés ou de verrouiller les portes, et si vous êtes étourdi, où vous avez garé votre véhicule. Mais ça le smartphone savait déjà le faire tout seul avec la géolocalisation,
  • le partage de position dans une situation de crise, détection d'accident en automatique, prévenir les proches ou les secours,
  • le niveau de carburant (avec seuil d'alertes paramétrables), kilomètres parcourus
  • la gestion de son budget carburant
  • la répartition des coûts au réel lors de co-voiturage
  • le coach pour améliorer votre conduite (le positionnement de la start-up Dash)
  • ...
Mais la leçon d'innovation numérique donnée par ces start-ups ne s'arrête pas là.

Car elles savent que la valeur des ecosystèmes suit la loi de Metcalfe, à savoir que la valeur d'un réseau augmente avec le carré du nombre de participants. Alors certaines applications comme Automatic vous ouvrent vos données récoltées dans leur "cloud", et via IFTTT, dont GreenSI parle souvent, vous pouvez les connecter à d'autres applications. D'une myriade d'acteurs, émerge une myriade de nouveaux usages en croisant les données.


Par exemple en se connectant à une application de gestion de flottes de véhicules pour les professionnels, à des logiciels de gestion  de dépenses (ex. Expensify), ou tout simplement à vos outils bureautiques, pour envoyer un e-mail en automatique à votre garagiste quand un problème technique est détecté, pour capturer dans un tableur tous vos trajets et leur consommation, ou pour allumer la lumière chez vous quand vous arrivez dans la rue.

Et oui, la voiture connectée parlera certainement dans un futur proche à votre maison connectée et votre à ville intelligente, mais ce sera pour un autre billet.

Bien sûr, qui dit ouverture de données, dit sécurité.

Et l'été a été riche en affaires de piratage de voitures connectés, par des journalistes ou des hackers, en mal de montrer les dangers de la révolution à venir.

Déjà avec une Jeep que deux acteurs ont réussi à faire quitter la route et qui a obligé Fiat Chrysler une semaine plus tard de lancer le rappel de 1,4 millions de voitures aux Etats-Unis.  Dans son billet "La sécurité du SI est-elle compatible avec son ouverture", GreenSI avait déjà parlé d'une ancienne vulnérabilité des Porsche, via leur application mobile (et ses API), qui elle a les "clefs logicielles" pour accéder à la voiture... et donc peut tenter un hackeur.

D'où l'importance des architectures et des règles de sécurité autour du développement de ces logiciels.

Le piratage de la Jeep a donné l'idée à Uber de recruter ces deux hackers à l'origine de cette expérimentation. Visiblement les compétences autour des données et le bigdata intéressent Uber, mais ça on le savait déjà puisque la valorisation de cette société sans chauffeur est dans son algorithme et sa plateforme.

Uber aussi modifie l'écosystème de l'industrie du transport, comme Waze, le réseau social des conducteurs, qui produit en masse des données géolocalisées enrichissant Google Maps. Une société déjà dans Alphabet, la maison mère de Google. Bien anticipé! 

Du conducteur à la voiture, c'est tout un ecosystème qui est en train de prendre d'assaut les données de la voiture et de la route, délaissées par les constructeurs et les équipementiers. Mais il semble qu'il y ait un sursaut des acteurs historiques, quand cet été AuditBMW et Daimler se regroupent pour racheter "Here" le service cartographique de Nokia, ou que l'équipementier Delphi rachète Ottomatika, une start-up qui développe des logiciels pour la conduite autonome et connue de la presse informatique, peut être même du DSI de Delphi. Avoir les mêmes armes (data, logiciel, géolocalisation, cartographie...) que ces start-ups, c'est effectivement une bon point de départ pour aborder sa transformation numérique.

En attendant l'arrivée d'Apple (rumeur estivale...), la bataille pour le contrôle des données commence à devenir passionnante dans ce secteur. GreenSI va certainement préparer un second billet sur ce sujet.


Mais au fait, elle est où la prise de données par laquelle vont arriver les startups dans votre industrie?
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