dimanche 22 février 2015

La liberté de lire (en illimité) est attaquée



La bataille des maisons d'édition contre Amazon fait rage et prends des formes de plus en plus diverses. La France, pays de l'exception culturelle, est un terrain idéal pour de nouvelles offensives des lobbys des éditeurs.

Cette semaine, au pays de Voltaire, nous venons de confirmer l'interdiction légale, de la lecture de livres électroniques en illimité.

La censure électronique (au volume), qui était en germe dans une loi de 2011, a été mise au grand jour. Explications. 

Aux Etats-Unis et au Royaume Uni, depuis l'an dernier pour Amazon, il est possible pour le prix d'un abonnement mensuel, de lire autant de livres qu'on le souhaite sur sa liseuse ou sa tablette. C'est ce qu'on appelle une offre illimitée, ou "Unlimited" chez Amazon. Au dernier salon du livre de Francfort en octobre 2014, Amazon annonce l'étendue de cette offre en Allemagne et cela fait déjà grincer les dents de l'autre côté de la frontière.

Mais Amazon n'est pas le seul à avoir ce type d'offre, puisqu'un petit français, Youboox, est convaincu de ce modèle depuis sa création et commercialise une offre de "streaming" de livres, à l'instar de ce qui se fait dans les films (Netflix) ou la musique (Deezer). Vous n'êtes pas propriétaire des livres que vous lisez et vous pouvez en lire autant que vous le souhaitez. La bonne vielle bibliothèque de quartier vient de rentrer chez vous par l'écran de votre tablette. Il n'y a pas de quoi en faire en fromage, non?

 

Et puis vous connaissez peut-être déjà YouScribe, plateforme communautaire française, mais aussi disponible en anglais et en espagnol, qui vous permet non seulement de lire en illimité, mais aussi de publier directement vos propres manuscrits pour les vendre.
Et ça les éditeurs, ils n'aiment pas du tout, mais alors pas du tout.

Imaginez les sueurs froides qu'ils doivent avoir en se disant qu'Amazon, comme le fait Netflix avec les séries, pourrait produire ses propres manuscrits avec des auteurs salariés ou fédérés. Et pourquoi pas que MyOwnMajorCompany puisse financer des oeuvres artistiques en faisant appel directement au public tant qu'on y est!

 

Le problème de ces offres pour les éditeurs est relativement simple à comprendre: on passe de la vente d'un produit à celle d'un service.

Mais plus d'un service (d'édition) pour les auteurs, mais bien d'un service pour les lecteurs. Et ça c'est déstabilisant. Amazon, aussi reconnu pour l'excellence de son service client s'engouffre sur cette relation directe avec le public qu'il connait bien, et que les éditeurs ont quelque peu négligée dans leurs plans stratégiques, et de facto sous-traitée.

Vous venez d'acheter ce livre, papier ou numérique? Il est trop tard pour s'apercevoir que ce n'était pas votre style. Où alors il fallait commencer à lire le chapitre 1 dans la librairie avant de l'acheter. Ce que propose Amazon en numérique, puisqu'on ne paye le livre numérique qu'au second chapitre (le premier pouvant être lu gratuitement). Mais quand on achète un service, on est plus propriétaire du produit et on peut en changer à volonté. A l'instar de cette nouvelle économie qui se développe, comme nous le rappelait La Tribune il y a déjà plus d'un an : la consommation collaborative n'est plus marginale.



Et c'est pour cela qu'il faut ce type d'abonnement en illimité. Car ce n'est plus de l'aide à la vente de livres, mais bien de l'aide au choix dans un catalogue. Vous ne risquez plus rien a essayer. Un peu comme si on avait mis dans votre tablette, Maria, cette géniale bibliothécaire de votre enfance, ou Fernand, ce bon vieux libraire de quartier que vous connaissez si bien pour vous aider à choisir, et qui vous reprenait sans questionner les livres que vous ne lisiez pas...
Et c'est là le second problème pour les éditeurs avec ce type d'offres .

Là où dans le monde physique il n'y aura pas de bons libraires comme Maria et Fernand pour vous conseiller, le monde numérique sera beaucoup plus pertinent.
C'est ce que l'on retrouve de façon générale dans le e-commerce quand les clients ne vont plus en magasins, car, non seulement ils ont plus d'infos sur Internet, incluant les avis des autres consommateurs, mais parfois les vendeurs ne sont plus de bons conseillers.

Dans un billet précédent (La DSI a t-elle besoin d'un CDO ) GreenSI avait cité l'exemple de Darty qui équipe, ses vendeurs de tablettes et ses magasins de Wifi, pour ré-équilibrer la relation client-vendeur, et redonner de la valeur à la présence en magasin. Il n'y a donc pas que Free qui ait tout compris! Les éditeurs vont devoir revisiter leurs relations au réseaux des libraires et favoriser le développement d'un réseau de conseils de proximité, de qualité. 

Mais en attendant, que faire quand le métier d'éditeur, et sa position dans la chaîne de valeur, est remis en cause? Et bien on change les lois!

Déjà on fait adopter en 2011 une loi pour que le prix du livre numérique soit aligné sur le livre papier... et donc bloqué, selon la loi Lang de 1981. 1981, une année trop symbolique pour qu'on en questionne la pertinence dans un monde numérique et 2011, un gouvernement Fillon, déjà en train de penser aux prochaines échéances présidentielles de 2012. Alors ni vu ni connu, sans réel débat citoyen on aménage la loi.

Le graphique ci-dessous montre cependant que la question du livre numérique se pose.



Et en 2015, on fait interdire à Amazon de proposer son offre Unlimited en France... en s'appuyant sur la rédaction un peu "étriquée" de la loi de 2011, à savoir que "c'est l'éditeur qui fixe le prix de vente du livre numérique". Or comme le prix de l'abonnement illimité n'est pas fixé par l'éditeur (on ne voit pas comment il pourrait l'être d'ailleurs) alors l'offre est jugée illégale. CQFD.

Et selon l'égalité du livre papier et électronique, GreenSI se demande d'ailleurs si réciproquement les bibliothèques payantes sont encore légales en France?

Mais cette interdiction signe aussi le sacrifice de nos deux héros français, Youboox et YouScribe, pourtant partis bien avant Amazon, et dont personne n'avait jugé illégales leurs offres innovantes auparavant. 


Ces deux startups n'ont peut être pas eu la main heureuse en choisissant des noms anglophones. Peut-être que si elles s'étaient appelées Livresberté, et avaient arboré sur leurs sites les couleurs de la FrenchTech, nos députés auraient compris qu'ils étaient en train de priver les consommateurs français d'une liberté, un droit à lire en illimité, et notre pays d'innovations.

En attendant la revue de ces lois de 1981 et 2011 par les citoyens, a qui on a encore rien demandé et qui ne sont pas dupes, on peut encore aller assouvir sa soif de liberté avec des offres basées à l'étranger... mais sans quitter son fauteuil et sa tablette, grâce à Internet. Une évasion de plus...

 

samedi 21 février 2015

Techdays.TV 2015: la DSI en mode startup

Interview par Marion Moreau de Frenchweb, de Juliette N'Guyen responsable de production de la STIME - groupement des Mousquetaires - et CTO de l'année 2015 (décerné par le CrIP) et Frédéric Charles, stratégie & gouvernance du SI de Lyonnaise des Eaux.

Comment adapter son SI a des évolutions permanentes?
Pourquoi adopter l'agilité, et sur quel périmètre?
Qu'est-ce que DevOps?

Les questions au cœur de cette émission de 30mn



dimanche 15 février 2015

Avec #Digital SNCF, la transformation numérique se déploie à grande vitesse

Cette semaine, la SNCF a organisé une conférence pour présenter son grand plan de transformation digitale: #Digital SNCF.

Une conférence à laquelle GreenSI était invité et où Yves Tyrode, nouveau Directeur Digital & Communication, a décliné tous les volets de cette transformation globale.

Et comme ce n'est pas tous les jours qu'on décide de voir plus grand, et plus vite, le bouillant Chief Digital Officer (CDO), comme il se nomme sur son profil LinkedIn, a multiplié les plateaux médias, avec entre autres une intervention chez Microsoft aux TechDays.TV et à FrenchWeb, avec une interview par Marion Moreau.

 

Ce qui a retenu l'attention de GreenSI, n'est pas tant l'ambitieux plan sur 18 mois (et 30 millions sur 3 ans) qui a été couvert par de nombreux médias, de La Tribune aux blogs spécialisés, mais ce qu'il révèle sur la transformation digitale des grands groupes en général.
Un plan en 5 projets:
  • NET pour connecter en 4G tous les sites SNCF pour raccorder les clients
  • Quotidien une offre 100% mobile pour les usagers qui bénéficieront de NET
  • Store.SNCF une plateforme pour faciliter tous les développements pour une communauté digitale, externe et interne
  • Flux.SNCF et Maintenance, les objets connectés et le bigdata pour mesurer et optimiser l'offre pour les usagers et la maintenance pour le matériel roulant
Mais laissons Yves Tyrode (via son profil LinkedIn) nous présenter la mission qu'il voit pour le Chief Digital Officer:

En tant que Chief Digital Officer, mon ambition en 2020 est de transformer SNCF en une organisation totalement digitalisée :
  • en insufflant la culture digitale « user centric » dans tous les métiers de SNCF Mobilités et SNCF Réseaux, à tous les niveaux de l’entreprise 
  • en connectant l’innovation SNCF à un écosystème de startups et champions du digital
  • en orchestrant la transversalité de l’information et des initiatives 
  • en renforçant la relation directe avec nos clients pour une meilleure connaissance de leurs attentes, une personnalisation des services offerts et une expérience sans couture de leur mobilité 
Chief Digital Office, une mission transverse clairement portée par la Direction Générale comme cela a été discuté dans un billet précédent (La DSI a t-elle besoin d'un CDO?). Une mission qui traite bien de la transformation interne (culture, applications métiers) et externe (relation numérique avec les clients), avec des passerelles entre l'interne et l'externe (open innovation, labs, startups). 

Et visiblement, avoir été un ancien Directeur marketing dans la technologie chez France Telecom Mobile, puis un ancien patron de Voyages-sncf.com, le premier site de e-commerce de France, est un bon bagage pour ce type de poste.

Ensuite la SNCF n'en est pas a son coup d'essai dans le numérique et ne se réveille pas en 2015 avec les barbares (blablacar, capitaine train...) a sa porte. Même si Capitaine train a rapidement rectifié sur Twitter la frise publiée en conférence ;-)



GreenSI avait d'ailleurs déjà abordé plusieurs de ces initiatives de Keolis et sa fililale Canal-TP, en passant par la refonte de ses sites internet avec Patrick Ropert, ex Directeur de la Communication, puis par l'opendata et les hackatons pilotés par Bénédicte Tilloy ex Directrice Générale de Transilien et la co-création d'applications avec les clients, notamment de l'application Tranquilien (par exemple: Open SNCF ou comment l'opendata transforme la SNCF).

Autant d'atouts à mettre en réseau et surtout à l'échelle, qui expliquent peut-être un horizon (si court) de 18 mois pour ce plan. Surtout pour un grand groupe de 250.000 employés, qui a certainement de multiples instances a consulter pour toute transformation, digitale ou pas.

Si vous voulez adopter les mots de la transformation numérique, #Digital SNCF nous éclairent. Car vu les moyens de communications déployés, ils ont du y réfléchir a deux fois.

Déjà n'oubliez pas le # associé à Twitter bien sûr, mais, de plus en plus au digital, en lieu et place du fameux @ qui risque de devenir "has been".
Ensuite le mot digital s'impose progressivement, même si GreenSI lui préfère en français le mot numérique (en anglais digit représente le numérique), qui ne renvoi pas qu'au marketing qui se l'était approprié ces dernières années (marketing digital). 

Enfin si on écoute les interviews, on retient qu'il est bon pour se transformer d'adopter aussi les mots: agile, data, mesurable, temps réel, API, open data, startup et usages.

L'agilité est bien sûr essentielle pour adapter son système d'information à l'inconnu, et à l'adaptation rapide de son business modèle. Thème de mon intervention aux Techdays.TV avec Juliette Nguyen, Directrice de la production de la STIME, qui s'est vue remettre par le CRiP le titre de CTO de l'année. 

Une agilité qui se matérialise dans les nouvelles démarches de développement, dans la production (DevOps), dans la gouvernance du SI mais aussi dans les calendriers. Et c'est peut être là la seconde explication du plan a 18 mois découpé en 3 périodes de 6 mois. Les projets sont engagés pour 6 mois et éventuellement recadrés a chaque période.

Donc une agilité permanente en amont dans la planification des projets qui demande une nouvelle forme d'organisation et de collaboration des équipes. Et là on se référera au "ruban de Moebius" Bus-Dev-Ops proposé par GreenSI (Laissez-vous inspirer par le rubans de Moebius) qui montre l'importance de l'agilité sur toutes les étapes de la chaîne, de l'amont à l'aval, en cycles courts: Business, Développement et Opérations.

La SNCF a décidé de créer des lieux de transformation (Nantes, Toulouse, Lyon, Paris, San Francisco) qui bénéficieront de cette nouvelle agilité et qui localiseront les principaux grands projets lancés.  Pour GreenSI c'est une façon de tester ces nouveaux modes d'organisation de façon limitée, avant d'impacter toutes les organisations, même si les produits qui sortiront de ces nouveaux ateliers du XXIeme siècle seront bien pour tous, internes comme externes.

Ces nouveaux lieux, au nom de code temporaire "TechCity", mettrons en musique les "cinq règles du Digital" selon la SNCF:
  • des plateaux projets de colocalisation des équipes,
  • la généralisation du mode agile,
  • l'ouverture a toutes les étapes: innovation, data, API,...
  • la mise en place de moyens (plateformes) pour monter les projets à l'échelle (et ne pas en rester a des pilotes internes ou des startups de niches),
  • mesurer et analyser la data partout
Sur le volet de l'ouverture, on retrouve l'idée de l'entreprise (ou de l'Etat) plateforme. 

Une plateforme pour y poser un écosystème d'acteurs innovants, mais aussi une plateforme technique qui propose un socle de données accessibles par des API, pour aider à se développer de nouveaux acteurs innovant dans le transport. Une approche de "fablabs", appelés par la SNCF simplement "Fabs", qui nous confirme les thèmes d'exploration de l'application de la technologie aux métiers: bigdata, opendata, user experience et objets connectés.

Et pour les API, la SNCF amène une nouvelle idée avec un modèle "freemium" très particulier. L’accès serait libre pour les applications qui génèrent un faible trafic (comme les startups qui se lancent) puis payant pour celles qui ont un trafic important. Les géants du web comme Google qui lorgne sur les données transport par exemple...

Des annonces devraient être faites en mai. L'année 2015 va certainement être passionnante pour l'API Management en France et GreenSI pense y laisser ses radars encore quelques temps.

dimanche 8 février 2015

Villes internet et déserts numériques, la fracture s'agrandit-elle?

Se tenait le 3 février, en présence d'Axelle Lemaire, la secrétaire d'Etat à l'Economie Numérique, la remise des labels "villes internet", euh pardon, des labels "territoires, villes et villages internet" comme c'est la nouvelle appellation. L'occasion de faire le point sur les initiatives des collectivités territoriales en la matière.

GreenSI avait déjà couvert en 2013 l'événement, et constatait qu'il y avait en France plus de ville fleuris, que de villes internet, dont les deux panneaux se tiennent fièrement en entrée de ville.

Oui, de nombreuses municipalités sont en retard, dans leur offre de services numériques aux citoyens et dans la prise en compte du numérique dans leur transformation interne. Ce qui faisait dire a GreenSI, un an plus tard, qu'il y avait des citoyens connectés, dans des villes déconnectées de la réalité d'internet

Où en est-on en cette année?

On peut déjà noter que, pour les nouvelles équipes municipales qui ont pu se faire élire en 2014 en exploitant l'absence de plan numérique de certaines communes, et en proposant des projets, ces labels 2015 étaient l'occasion de faire "valider" leurs initiatives et d'essayer d'obtenir leurs premiers "@". Et par la même de faire reculer ce que GreenSI appelle le "désert numérique", l'absence de présence sur internet de la collectivité territoriale.

Car à défaut de pouvoir voter par internet, les citoyens connectés pèsent quand même dans les débats électoraux, même si le numérique y est encore peu présent. Comme le constatait l'étude SocialNext Work: seulement 60% des candidats ayant un programme publié sur leur site, abordaient le numérique dans leur actions municipales. Pas de doute, pour 40% d'entre eux, Internet c'est encore un journal municipal confié à un webmaster...

Et pourtant la transformation numérique, en dehors des entreprises et des startups de la FrenchTech, c'est bien en régions qu'elle se passe. 

Et GreenSI en veut pour signe, la "caravane" du CNNum - Conseil National du Numérique - qui après avoir lancé une consultation en ligne sur l'ambition numérique de la France (à la demande de Manuel Valls), fait le tour des régions avec des journées contributives pour débattre des idées récoltées.
A Strasbourg le 9 janvier, à Bordeaux le 19 et à Nantes la semaine dernière. 

Aucun doute, le numérique transforme la société en profondeur et pour les meilleurs on en n'est déjà plus à compter les panneaux d'entrée de ville.

Si vous avez le temps, visualisez cette vidéo d'introduction de la journée à Bordeaux où Daniel Kaplan (Fing), Pascal Faure (Direction Générale des Entreprises au Ministère des Finances) et Gaël Musquet (porte parole d'OpenStreetMap), nous montrent les enjeux du numérique pour la société et le travail citoyen.




Mais revenons à la cérémonie de remise des labels.

Avec humour GreenSI a identifié un autre vecteur de mobilisation en faveur du numérique: la peur de disparaître!

Et oui, c'est quand même en 2015, après les idées de simplification du "mille feuille territorial", que l'Assemblée des Départements se dote du label "Département.net" pour saluer les initiatives numériques des départements. 

C'est sûr que ne pas faire savoir ce que l'on fait, est certainement une façon accélérée de mettre le premier pied dans sa tombe. Et la  DSI en sait quelque chose ! Espérons que ces labels n'en resteront pas a saluer des journaux départementaux en ligne, mais bien des débuts de transformations numériques réelles.

Cette année pour avoir 4@ ou 5@, dont les pré-requis augmentent régulièrement, il fallait pouvoir démontrer une initiative:
  • de promotion des usages d’Internet auprès de l’ensemble de la population (dans la continuité ou l’élargissement des missions historiquement conférées aux Lieux d’Accès publics à Internet), et de l'usage des TIC dans le monde scolaire ou périscolaire,
  • de facilitation des échanges entre citoyens, et aussi de dialogue ou d’interpellation entre élus et citoyens,
  • de lutte contre la « fracture numérique », de prendre en compte les handicaps et de porter attention aux publics « fragiles »
  • ou de façon plus surprenante (car d'une certaine façon engagée) de promotion des logiciels libres. Mais ce n'est pas GreenSI, défenseur de l'open source, qui va s'en plaindre.
  • en revanche rien sur l'open data... ce sera pour 2016?
Donc un grand bravo aux 190 collectivités qui ont obtenu au moins une @ !

C'est toujours autant de collectivités qui basculent ou se renforcent dans la république numérique qu'Axelle Lemaire appelle de ses voeux. Mais cela reste très faible en regard du nombre de collectivités en France. D'où le sentiment de GreenSI comme quoi la fracture numérique entre collectivités locales augmente.  Les meilleurs s'améliorent et les retardataires n'arrivent pas en masse contrairement à ce que l'on devrait constater si la numérisation suivait une courbe de Gauss (avec des "early adopters" et le "main stream").

 
Sans surprise l'Ile de France reste en tête, suivie de près par la région Rhône Alpes, en nombre de villes participantes. Et si vous habitez en Franche Comté, mobilisez-vous vite auprès de vos élus, avant que cela ne devienne un désert numérique !
D'ailleurs on me signale que la résistance a commencée avec @siliconcomte une Association indépendante de professionnels/entreprises du numérique de Besançon et sa région. A suivre sur Twitter sans modération!

 
Et pour finir, scannons l'image d'Epinal, une ville 5@ pleine de projets.
 
Cette année elle aura refondu et mis en ligne son système d'information géographique, défini une stratégie numérique 2014-2020, poursuivi l'aménagement numérique du territoire et des accès internet publics, et après analyse du trafic, repensé sa page d'accueil sur les informations utiles aux citoyens. On est vraiment dans la transformation et dans la réflexion stratégique autour du numérique, alors qu'a l'autre bout du spectre, certaines collectivités n'ont toujours pas de sites internet.


Mais quand on surfe sur les sites des 5@, on remarque que ce n'est pas encore du "responsive", accessible depuis tous les terminaux. Même si la plupart des sites restent a peu près utilisables sur une tablette.

Attention, car avec la migration des usages en mobilité, notamment des jeunes, cela pourrait être une nouvelle fracture dans l'accès à l'information et la relation numérique avec sa collectivité. 
C'est peut être ça la prochaine révolution pour nos territoires, villes, villages internet, et départements. GreenSI leur propose même le prochain panneau à afficher en entrée de leur ville ;-)
 
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dimanche 1 février 2015

Des objets connectés à la DSI. Pour quoi faire?



Fin 2012, LeWeb faisait des objets connectés le thème de sa conférence, très fréquentée par les startupers et les investisseurs en recherche d'idées.

GreenSI y explorait l'impact de ces objets sur les IHM. Des IHM qui se libèrent de la souris et du sacro-saint clavier, pour migrer vers le tactile et de nouvelles façons de capturer de l'information et d'interaction avec les utilisateurs. L'IHM, un sujet suffisamment important dans l'expérience utilisateurs, internes ou clients de l'entreprise, pour que la DSI s'y intéresse.

Mais les objets connectés, c'est aussi un sujet d'innovation qui peut facilement être exploité pour redorer le blason d'une DSI pas toujours invitée (par oubli?) à la table de la transformation numérique.

Allez voir le DG et dites lui qu'il pourra être alerté des commandes de plus de 100.000€, directement sur sa nouvelle montre connectée qu'il a eu à Noël, et vous allez voir le résultat.

Même si, sur le fond, pour la comptabilité et pour les experts, on a l'impression que cela reste du gadget, juste de l'assemblage de services SOA développés depuis longtemps et amenés avec un bout de code sur une application Android ou sur un portail. 

En fait, si les objets connectés permettent de capturer de l'information comme des délais, des chocs, des déplacements, des températures... et que ces données permettent d'améliorer les processus de l'entreprise, leur traçabilité, voir de les transformer, alors ce ne sont certainement pas des gadgets pour l'entreprise.

Les objets connectés dans l'entreprise peuvent devenir une réalité utile.

Notamment dans le domaine de la relation clients. Car n'oublions pas que derrière chacun de ces objets il y aura un client ou un prospect connecté, et donc certainement des opportunités pour entrer en relation (dans les deux sens).

GreenSI considère que les objets connectés sont l'une des tendances qui semble la plus disruptive pour les systèmes d'information dans les années qui viennent.

Qu'est-ce qui change avec les objets connectés?

Pas nécessairement a cause des objets eux-mêmes, mais surtout a cause de l'architecture répartie qu'ils demandent et qui n'était pas toujours la règle dans de nombreuses industries.

Si la DSI pense que c'est un gadget, elle risque de se faire surprendre, ou court-circuiter, quand les volumes seront là. Car il faudra bien que quelqu'un traite les données des 30 ou 50 milliards d'objets prévus à l'horizon 2020, selon les analystes.


Les sociétés d'autoroutes qui ont des capteurs dans la chaussée pour mesurer le trafic, les sociétés de mobilier urbain qui gèrent l'information transport en temps réel, où les opérateurs de distribution d'eau qui ont déployé des compteurs intelligents autonomes (il y a déjà plus de 7 ans à Paris pour la Lyonnaise des Eaux); comprennent le rôle et la nature d'un réseau informatique pouvant atteindre tout point du territoire. Pour cela ils ont dû maîtriser toute la chaîne du capteur, jusqu'au portail de l'utilisateur, en passant par les émetteurs, récepteurs et sa supervision. 

Mais pour GreenSI, avec la prévision de l'avènement en masse des objets connectés, dans les domiciles, sur la route et y compris dans l'entreprise, deux choses sont nouvelles par rapport a ces exemples:

  • l'entreprise n'aura plus a construire son propre réseau, plus ou moins propriétaire, pour connecter l'ensemble de ces objets a son système d'information. Car la demande grand public sera telle, que l'offre va se renforcer, les coûts d'accès baisser et les standards deviendront ouverts. La Poste a par exemple annoncé au CES une initiative dans ce sens. Et le corollaire sera qu'il faudra être compatible avec plusieurs réseaux, et de multiples objets, en fonction des territoires et des applications.
  • toutes les entreprises seront concernées par l'accès a une telle infrastructure et pas uniquement les opérateurs cités précédemment. Les compagnies d'assurance investissent pour créer du lien avec les assurés, personnaliser leur offre et ne pas compter que sur les modèles statistiques impersonnels. Les marques de sport, ont compris tout l'enjeu d'être les coach sportifs de leurs clients. Les acteurs de la santé commencent à imaginer une nouvelle relation patient-médecin, etc, etc... 

Dans ce contexte, quel serait le rôle de la DSI?

Ceux qui lisent GreenSI régulièrement savent que la DSI doit revendiquer son rôle d'animateur dans l'entreprise, de la communauté qui veut tirer parti des nouvelles technologies, et pourquoi pas de conduire la transformation numérique d'une partie de l'entreprise.

Avec les objets connectés, la DSI doit jouer ce rôle d'évangéliste et d'incitation des autres Direction à s'engager dans des pilotes. Comme d'envoyer les commandes importantes sur la montre du DG pour réveiller l'entreprise sur le sujet ;-)

Mais ne nous y trompons pas. Les objets connectés, c'est un sujet de données, et d'architecture, pas d'objets. 

D'ailleurs les objets risquent d'être pour la plupart fabriqués en Chine ou en Thaïland. Même si la France cherche faire jouer son terreau d'innovation et de compétences autour d'Angers, avec la Cité des objets connectés, une des actions du plan Objets connectés de la Nouvelle France Industrielle, porté par la société Eolane et lancé par l'ancienne secrétaire d'Etat à l'économie numérique, Fleur Pellerin, début 2014.

En revanche la donnée, elle, va circuler dans votre système d'information, rendre les applications plus "intelligentes"si on sait les analyser, et rendre les processus de l'entreprise plus agiles. La DSI est donc totalement légitime pour préparer ces plateformes de données, connectés aux réseaux répartis, qui permettront au métier d'imaginer et de développer leurs applications.

Car si les objets connectés de l'entreprise se développent, pourquoi ne pas mutualiser une infrastructure et éviter que chaque projet développe ses standards. Pour les adeptes du Cloud, c'est bien d'un PaaS -  Plateform as a Service - dont on parle. Et ce PaaS sera le socle de développement des applications futures, tournées vers les clients (et même peut être les salariés mais c'est une autre histoire), qui tôt ou tard, seront reliées a tous ces objets connectés et qui pourra même être ouvert a des tiers (schéma emprunté à Alten).
 
Lors de la conférence Tendances Cloud, en 2012, dans laquelle j'intervenais, une question de la salle portait, dans ma présentation, sur pourquoi faire un lien entre le Cloud et les objets connectés? Cela paraissait étrange alors que toutes les grandes DSI pouvaient construire leur propre réseau. Et bien parce que le Cloud, public ou privé, c'est un point commun entre tous les réseaux et tous les objets, d'ailleurs c'est pour cela qu'on l'a appelé Inter - Net.

Nous y sommes! L'internet comme plateforme.

Et pour vous en convaincre, demandez a WhithingsFitBitParot, et autres sociétés producteurs d'objets connectés et de services a ses utilisateurs, ce qu'ils feraient sans le Cloud. Pas grand chose...

Alors oui c'est vrai que les opérateurs des réseaux GPRS, GSM, 3G, 4G proposent déjà une connectivité étendue avec le M2M, machine-to-machine, mais cela demande une carte SIM et de passer par leur réseau. L'internet est pour l'instant plus économique pour les objets grand-publicn surtout quand leur business modèle n'est pas encore démontré. Donc dès qu'un objet pourra se connecter a une box ou a un smartphone (la box mobile), il le fera avant d'utiliser la 3G ou un autre réseau. Et une fois connecté, vos services dans le Cloud sont accessibles.

Un projet transverse pour l'entreprise 

En synthèse, les objets connectés c'est déjà un sujet de Data et de Cloud. La DSI semble donc bien placée pour s'en occuper. En revanche, le rôle de la DSI n'est pas nécessairement sur toute la chaîne, du capteur jusqu'au portail. La DSI devra donc travailler avec les autres directions et pas toujours avec ses propres briques techniques. 

Et puis il n'y aura pas que de la technique. Car les objets connectés vont aussi amener d'autres sujets comme la sécurité, d'accès au SI mais aussi des personnes, la géolocalisation, l'éthique dans l'analyse des données clients, voir de législation a respecter pour les données personnelles et pour les données des salariés. Les règlements de services et les contrats de travail ne sortiront pas indemnes de cette arrivée massive d'objets qui vont couvrir certains, de la tête aux pieds.




Sans compter sur le rôle de la machine par rapport à l'humain, dans les organisations où les syndicats scrutent en permanence le déplacement de toute frontière dans l'organisation du travail.

Enfin, il y aura la question des objets amenés par les salariés. Une sorte de généralisation du BYOD. Pourront-ils se connecter au réseau, voir au poste de travail pour y synchroniser leurs données sur Internet? A qui appartiennent ces données?...

Dans le doute, les accès a ces sites seront bloqués par les équipes infrastructure, comme Facebook l'a été a ses début. Pourtant certains objets qui concernent leur santé et leur bien être peuvent aussi avoir un intérêt dans les bureaux de l'entreprise. Voir même être proposés par l'entreprise elle même.

Dans un tel contexte, on imagine que dans les grandes entreprises, souvent conservatrices, le passage de l'expérimentation au régime industriel, ne sera pas une simple balade de santé.

On peut donc se demander, si une unité spécifique en charge de la stratégie autour des objets connectés, n'aurait pas un sens si elle est pilotée par la DG?
Peut-être autour du fameux Chief Digital Officer.
Mais ce ne serait qu'une étape transitoire pour une réelle appropriation par les directions métiers (et un ancrage dans leurs processus) et par la DSIen tant qu'intégrateur de cette plateforme de données connectées, dont tout le monde aura besoin.

Alors 2015 l'année des objets connectés dans les entreprises?

Certainement pas pour la phase industrielle, compte tenu des sujets qu'elle soulève, sauf pour les secteurs où ce virage est un enjeu majeur pour la transformation numérique voir pour assurer leur survie avec un nouveau modèle. Fixons l'horizon a 2017.

En revanche, 2015 pourrait être l'année des objets connectés sur le front de l'expérimentation et de la réflexion sur l'architecture du SI de l'entreprise étendue.

Et pourquoi pas en 2015, favoriser l'achat, ou distribuer des objets connectés a vos salariés, sans aucun autre objectif que de se les approprier et d'imaginer des cas d'usages. 

Comme cela, dans les futures réunions sur le "pour ou contre les objets connectés", qui ne manqueront pas d'arriver, on aura des participants qui sauront de quoi ils parlent. J'ai toujours été frappé par les personnes qui ont des opinions tranchées sur Internet et n'utilisent à titre personnel, au mieux, que l'e-mail sans connaître la multitude des usages.

Autre source d'apprentissage pour l'entreprise et signe des temps, le premier salon professionnel de l'Internet des Objets qui se tiendra à Lyon au mois d'Avril.



Les objets connectés dans l'entreprise ne seront donc certainement pas un gadget de plus sur le bureau des salariés, mais bien un axe de transformation numérique, que la DSI peut faciliter en préparant la plateforme mutualisée dont ces objets leurs applications auront besoin. Sujet à garder sur son radar. 

La DSI, c’est la direction logistique du monde digital

Bertrand Duperrin est Directeur chez Nexmodernity et pionner de l'utilisation des technologies collaboratives (aussi dites "sociales"). Mais Bertrand est surtout un observateur curieux du monde digital qui en rencontre tous les acteurs. 

Je me suis prêté (autour d'une bière) au jeu de l'interview sans tabou et du tac au tac, sur les DSI et le numérique, en passant par l'ERP qui n'a pas tenu sa promesse d'organiser tous les flux de l'entreprise.

Le collaboratif et l'entreprise numérique ne sont que des plaques différentes, en train de se rapprocher pour former un unique continent, où les systèmes d'information ont un rôle crucial à jouer. 

La seconde plus longue interview de son blog "Bloc Note de Bertrand Duperrin". Alors prenez votre souffle...

INTERVIEW

L'humour de ceux qui aiment le numérique