dimanche 9 octobre 2011

Infobésité: il faudra bien se résoudre à repenser l'email en entreprise

La première réflexion que l'on peut avoir c'est pourquoi a t-on trop de mails et trop d'information ?
Le livre "The New Normal" de Peter Hensen, professeur à la London Business School, est sans appel sur la numérisation de la société. Nous avons passé les 20 dernières années a découvrir et nous émerveiller devant le numérique qui grignote tous les domaines: échanges, photos, videos, presse... C'est a chaque fois quelque chose de nouveau, adopté au départ par une petite poignée d'individus
Les 20 prochaines années le numérique sera juste "normal". Il sera l'usage majoritaire.

Revenons donc a nos emails et à nos informations. La bonne nouvelle c'est que c'est donc normal que leur volume augmente! On parle de Zettaoctets a l'échelle mondiale (10 puissance 21). La mauvaise nouvelle c'est que nous n'y sommes pas préparés et nos outils de communication sont encore a l'age préhistorique de la première messagerie électronique.

Il va donc falloir commencer a mettre en place des outils pour faire face à "l'infobésité" et pour désencombrer sa boite mail. Et les DSI sont en première ligne pour aider l'entreprise a sortir du "bourbier numérique" dans lequel elle est en train de s'enfoncer...
Avec des conséquences humaines importantes (l'email cité comme facteur de stress en entreprise)

Ce n'est pas la fin du mail, même si certains l'annonce. C'est son recentrage sur les cas d'usages où il est efficace et adapté: la communication personne a personne sécurisée en mode asynchrone. Très efficace aussi pour les alertes qui en sont un cas simplifié.

Mais ce qui est important c'est surtout son remplacement là où il est inefficace:
  • il n'est pas fait pour le synchrone: préférez la messagerie instantanée
  • il n'est pas fait pour l'édition concurrente: préférez un wiki a des échanges sans fin pour corriger un texte
  • il n'est pas fait pour les processus collaboratifs: préférez une gestion de formulaire pour valider vos notes de frais
  • il n'est pas fait pour publier des documents: préférez les bases documentaires avec une gestion de droits adaptée. Utilisez l'email pour alerter uniquement... sans pièce jointe!
  • c'est un destructeur massif de connaissances car une fois les échanges achevés ils ne peuvent être capitalisés par l'entreprise et sont détruits avec le départ de chaque salarié. Ce qui est paradoxal car en cas d'enquête juridique ils sont "aspirés" en premier par les enquêteurs alors que l'entreprise n'a pas le droit de le faire elle même.
Une règle que GreenSI aime bien: si après avoir lu et traité un email vous devez le garder, pire l'archiver, c'est suspect! Un email doit pouvoir être détruit... Posez vous la question régulièrement et détectez vos comportements non collaboratifs, c'est redoutable.

Oui il a trop d'information et ça ne va pas s’arrêter.
Alors nous devons perdre notre habitude de vouloir tout lire!Est-ce que cela a encore un sens de vouloir regarder toutes les videos YouTube? En 2009, chaque minute, il se chargeait 24h de video sur YouTube. En 2011 c'est 48h. Une vie ne suffit plus. Vous avez compris le problème!

Donc a moins d'interdire mondialement de produire du contenu numérique, notre salut réside dans le filtrage intelligent et l'acceptation que l'exhaustivité est un concept obsolète dans un monde numérique.
On ne pourra plus TOUT traiter mais on devra traiter ce qui a du sens POUR MOI. Avec une marge d'erreur bien sûr, bienvenue dans un monde où la statistique est la seule certitude que vous pourrez avoir. Vous ne serez pas sûr d'avoir raté un email ou une info, mais vous aurez mis en place un dispositif, plus ou moins sophistiqué pour en être plus ou moins confiant.

Pour filtrer on peut s'appuyer sur des algorithmes intelligents. C'est la voie prise par Google avec sa "priority box" ou le traitement du spam. On y retrouve la compréhension naturelle des algorithmes mathématiques qu'a Google dans son ADN issu de l'Université de Stanford. Et ce sera la seule issue pour l'évolution des messageries. Microsoft n'a pas fait évoluer Outlook de façon radicale mais des start-ups l'ont fait pour lui avec des produits complémentaires plus intelligents pour classer et traiter ses mails.

Il existe cependant une seconde voie que la machine, c'est l'humain. Tout simplement.

 Par exemple un réseau d'experts qui fait de la veille sur un sujet va plus rapidement qu'un néophyte identifier l'information pertinente. Alors pourquoi vouloir le faire soi même quand on est néophyte et ne pas juste suivre ce réseau. Ainsi on peut supprimer le bombardement de newsletter qui arrivent dans nos boites mails et aller dans les réseaux sociaux chercher les bonnes personnes a suivre.
De même pourquoi tout stocker si d'autres stockent et classent collaborativement a notre place ou si je peux poser une question sur un réseau et avoir une réponse dans la journée. 
Les usages de la collaboration 2.0 sont déjà là et vont certainement encore se développer. De toutes les façons, on n'a pas le choix.

Ce qui va manquer dans les années à venir alors c'est le poste de travail "unifié" qui va permettre de suivre ses flux, synchrones et asynchrones, mails (ceux qui restent), ses alertes, son réseau et ses conversations, depuis la même interface et avoir la capacité de poursuivre ou engager l'échange que ce soit une réponse, un commentaire ou une nouvelle idée.
Et comme sur Twitter, ce poste de travail sera conçu en gardant en tête que l'exhaustivité est un concept a oublier (vous avez 2345 messages!) et que l'intelligence des filtres et les statistiques sont la seule planche de salut (les 10 messages à lire ce matin). Sur Twitter vous lisez les tweets régulièrement mais pas tous. Si quelque chose est important elle devrait revenir car d'autres vont la retweeter, sinon c'est que ce n'était pas important.
Et bien sûr ce poste de travail sera mobile et multi-plateformes.

Dans le grand public c'est clairement la stratégie de Facebook (qui a ajouté les emails aux conversations) et de Google (qui a ajouté les conversations Google+ aux emails). Ces deux sociétés dont les revenus sont tirés par la publicité n'ont comme objectif  que de vous "capturer" sur leur plateforme pour que vous ne la quittiez plus. L'intégration des échanges et donc le point névralgique pour vous retrouver tous les jours... et mieux vous connaître.

Dans les entreprises on attend toujours.
Lotus Connection 3.0 comme évolution de la messagerie Lotus Notes est un début de réponse. Mais n'est pas encore suffisamment ouvert a un environnement nécessairement hétérogène. Des outils agrégateurs ou des réseaux sociaux existent en entreprise, mais compte tenu du poids de l'emails une solution partant de la messagerie serait plus facile a faire passer auprès des utilisateurs. Rappelez vous qu'en entreprise les utilisateurs sont encore rivés a leur souris dans un monde où le tactile est de plus en plus présent. Cela va donc prendre du temps et de la gestion du changement...

L'humour de ceux qui aiment le numérique